lundi 5 septembre 2016

3 axes dans l'éducation de nos enfants (formulés par Monsieur)

Voyages voyages… plus loin que…
Notre petit Tour de France estival a représenté l’occasion pour nous d’approfondir mais surtout clarifier nos réflexions sur l’éducation que nous souhaitons donner à nos enfants grâce à
  • la poursuite de la lecture en couple de « Parents Epanouis, Enfants Epanouis », de FABER & MAZLISH
  • la confrontation de notre pratique balbutiante aux regards pas toujours approbateurs de nos propres parents (car ce qui se conçoit bien s'énonce clairement et... nous pataugions encore!)
  • le bouffage de nombreux kilomètres = autant d'heures de trajet que nous avons pu mettre à profit pour causer...

C’est donc en voiture que Monsieur Bout a pu verbaliser sa difficulté à se positionner au niveau éducatif : certain de vouloir faire autrement que ses parents, il se sentait cependant perdu, en manque d’une ligne directrice retraçant notre projet éducatif à nous.
En effet, "Parents Epanouis, Enfants Epanouis" distille des conseils pratiques entourés d’éléments plus « de principe », et qui nous plaisaient bien, mais sans nécessairement offrir une réflexion structurée.
Or, Monsieur Bout est ainsi fait qu’il a besoin de saisir la logique générale avant de rentrer dans le moindre détail

De ce fait, il peinait à replacer les conseils glanés au fil de notre lecture à 4 yeux de F&M dans une structure plus globale et donc plus facile à appréhender pour lui. Un point auquel je suis à la fois moins sensible, et sur lequel j’avais, de plus, une longueur d’avance notamment dûe au travail de structuration que j’étais en train de mener sur mes notes de lecture de « Entre parent et enfant ».
Nous avons pris le temps de réévoquer les principaux points, examiner nos interrogations, et faire le tri entre les différentes approches auxquelles nous avons été confrontés, pour aboutir à une synthèse, par Monsieur Bout, de la philosophie que nous souhaitons suivre. (notée en live sur mon Bullet Journal - hop petite page de pub ;-) )

Je vous livre ici le fruit de nos discussions :
  • c'est une chouette synthèse, d'abord (Monsieur Bout est le roi de la synthèse ;-) ),
  • et puis j'ai pensé que ce travail de formalisation pourrait aussi être utile à d’autres (que vous vous retrouviez ou non dans les différents points, mais cela permet de poser les choses, même si c’est pour faire des choix différents).



Axe 1 : Apprendre et permettre à l’enfant d’exprimer ses besoins et ses émotions


Nous reprenons à notre compte Haïm Ginott et sa « liberté absolue du désir » : nos enfants ont le droit de vouloir, ne pas vouloir, ressentir, y compris ce qui nous déplaît ou nous semble absurde

Un objectif majeur : éviter que ses émotions soient réprimées, et s’expriment en décalé ou par d’autres biais, ou dans 20 ans, ce que nous appellerions l’effet cocotte-minute.

Une mission essentielle pour nous : apprendre à l’enfant des moyens acceptables d’exprimer lesdits besoins et émotions : on peut
  • demander gentiment au lieu de revendiquer,
  • exprimer la déception sans vriller les oreilles de toute la famille avec ses lamentations, ou attaquer,
  • montrer sa colère sans violence.

Je ne m'étends pas davantage sur ces deux points ici, et vous renvoie à mes billets sur F&M et Haïm Ginott.

Mais pour nous, dans cet axe s'inscrit aussi une préoccupation capitale : respecter les besoins et émotions de l'enfant, c'est aussi veiller à préserver et développer son enthousiasme, développer sa motivation intrinsèque à faire les choses.
Dans nos vies professionnelles, nous avons tous les deux vu beaucoup de personnes qui, ne savant pas ce qu'elles aiment, ne savent pas choisir, font des trucs qui ne leur conviennent pas, pour des raisons qui n'ont rien à voir avec ces mêmes trucs... voire ont perdu toute énergie, et fonctionnent à vide, sans ressort.(edit: d'où mon énervement concernant le bac S)
(que des gens soient sur un job qui ne leur conviennent pas, et donc pas très bons dedans, je le conçois... Mais chez la plupart, il y a des domaines autres que le professionnel dans lesquels on voit de quoi cette personne est capable pour quelque chose qui la fait vibrer... 
Cependant, parfois aussi, creuser, c'est s'apercevoir que quelqu'un n'a en fait aucun centre d'intérêt dans sa vie, rien qui réveille la moindre étincelle chez lui. Je me souviens très précisément de la première personne pour laquelle je suis arrivée à ce constat, et j'en frémis.)
C'est quelque chose que nous voulons éviter à nos enfants, en leur apprenant à rester en contact avec ce qu'ils ressentent, de manière à pouvoir choisir et faire les choses pour elles-mêmes, et ainsi, être branché sur la plus formidable source d'énergie qui soit !

Nous voulons donc prendre garde à respecter les centres d'intérêt de l'enfant, convaincus que nous sommes que c'est en surfant dessus qu'il trouvera goût à l'effort. 
  • C'est aussi dans ce cadre que, pour nous, s'inscrit le fait d'éviter la survalorisation de ses actions
  • Mais aussi est surtout, s'y rattache le souci de ne pas charger les comportements de nos enfants de conséquences qui n'ont rien à voir avec le schmilblick,
    • que ce soit en positif : promettre une récompense, du style (j'ai eu le cas pendant les vacances) : "si tu es sage à table tu pourras fermer toi-même mes volets électriques"
    • ou en négatif : menace à la "si tu ne dis pas bonjour, pas de gâteau ce soir
  • Mais plutôt :  les inviter à faire les choses pour elles-mêmes, non pour le regard des autres ou des avantages artificiels. Les exemples susmentionnés sont à nos yeux très différents d'un "si tu tardes trop à t'habiller, nous n'aurons pas le temps de passer regarder le tramway sur le chemin du parc".



Axe 2 : Apprendre l’écoute des sentiments des autres, première justification des règles, qu’elles soient universelles ou pas


Notre objectif : faire de nos enfants des humains, capables d’être heureux, c'est-à-dire à la fois d’écouter leurs propres besoins mais aussi de vivre des relations épanouissantes (donc respectueuses) avec d’autres êtres humains.

Une mission essentielle pour nous : exprimer clairement les limites, celles de la société, mais aussi les nôtres ! 

Les deux sont liées, puisque toute limite s’enracine dans les limites personnelles de chacun.
Ceci explique
  • à la fois les règles et limites universelles : on ne tape pas, on respecte la propriété privée, on dit merci
  • et celles qui varient selon le temps ou les personnes :
    • quand Maman est fatiguée, elle a besoin de calme et ce n’est pas le moment de faire un jeu bruyant à côté d’elle ;
    • si telle personne tient particulièrement à son vase, celui-ci ne doit pas être touché, même si des vases apparemment similaires sont en libre-service au domicile familial.

Nous voulons donc  avant tout prendre soin de développer l’empathie chez nos enfants, plutôt que nous assurer une obéissance extérieure mais sans réelle conviction, et ne tenant que par la contrainte extérieure. Pas du dressage ni une obéissance mécanique, mais une attention aux sentiments, plus profonde.

Dans le respect d’une règle, nous voyons en effet 3 niveaux
  • La répétition bête et méchante
  • L’acceptation rationnelle
  • L’adhésion car la règle est émotionnellement intégrée
Pour nous il s’agit de travailler sur les 3 niveaux à la fois : à la réflexion, le premier aussi a son importance, car si nous laissons la limite être franchie « en attendant qu’il adhère », nous ne signifions pas assez clairement l’importance de cette limite, ni ne nous montrons suffisamment comme des êtres ayant des limites qu’il est important de respecter.(edit: les limites des parents, un point essentiel que je développe ici, , puis !)
Mais nous devons aussi prendre garde à ce que le lien avec les plans 2 et 3 ne soit jamais perdu de vue.

Axe 3 : un enfant n’est pas un adulte

Avoir des attentes réalistes :

On ne peut exiger d’un enfant de 3 mois qu’il respecte notre sommeil, ni n’exprime son inconfort autrement que par des pleurs ; les choses sont différentes à 3 ans, et bien davantage à 5…

Sur un point plus concret, qui a été en partie à l’origine de notre discussion : on ne peut attendre d’un enfant de 3 ans qu’il se tienne 3 heures sans bouger, sans rien avoir à faire, au resto, entre 19 et 22h… (à la terrasse d’un resto comprenant une aire pleine de petits cailloux mais où la première phrase adressée aux enfants l’a été pour préciser qu’il était interdit de marcher sur lesdits cailloux – et a fortiori, de jouer avec. Soupir).
A cet égard, Monsieur Bout a fait très justement la remarque qu’on accepte beaucoup mieux le besoin, au cours d’une sortie au resto, qu’un adulte fumeur peut ressentir de se lever plusieurs fois de table pour aller griller une cigarette entre les plats, que celui d’un enfant d’aller courir entre ces mêmes plats…

A nous de réfléchir à l’environnement dans lequel on le place : un environnement peut être
  • porteur : lui permettre ce vers quoi son envie de grandir le porte naturellement si elle n’est pas contrariée : se concentrer sur quelque chose, utiliser son énergie vitale dans le sens de son développement et d’une plus grande autonomie ; environnement montessorien par exemple
  • ou source de problèmes : si on place un petit enfant dans un magasin de cristal avec interdiction de toucher à rien… ou qu’on lui demande de se tenir bien à table sur un siège trop bas

Mais des attentes réalistes dans les deux sens : il s’agit aussi de demander assez à ses enfants, et c’est un point sur lequel nos vacances nous ont permis de réfléchir et d’aboutir à la conclusion que nous n’attendions pas assez de F. Il est capable de formuler davantage et mieux ses demandes, il est capable de faire plus de choses tout seul, il est capable d’être calme plus longtemps que nous n’osions le lui demander à la messe…


Pendant que nous y étions (eh oui, les km, toujours !), nous nous sommes interrogés sur les origines des attentes non réalistes dans les deux sens et avons notamment repéré
  • La peur du regard des autres, la honte vis-à-vis de manifestations naturelles de l’enfance, qui empêche de prendre en compte l’enfant, et amène à vouloir avant tout se dissocier de l’enfant
  • Inquiétude envers l’avenir, à travers un double manque de confiance
    • Aucune confiance dans l’intérêt de l’enfant pour apprendre, pour devenir autonome :
      • si on ne morigénait pas longuement l’enfant qui a oublié son parapluie, jamais il n’aurait de lui-même l’envie de ne pas l’oublier.
      • On oublie ainsi que l’expérience la plus satisfaisante pour l’enfant est celle de réussir à faire tout seul, et que plus on lui permet de faire cette expérience, plus il cherche à retrouver cette satisfaction. Réaliser que l’enfant en veut à celui qui le maintient dépendant nous a bien aidés !
    • Aucune confiance dans la capacité de l’enfant à se confronter aux conséquences : se faire mouiller du fait de l’oubli dudit parapluie ? Non, on traversera la moitié de la ville pour le lui apporter à l’école…


Les apprentissages ne sont pas linéaires

  • Avec Montessori, nous avions été sensibilisés au fait que ce n’est pas parce qu’un enfant a su faire une chose une fois qu’il lui est facile de la reproduire, ou que son échec à le faire est à attribuer à de la mauvaise volonté. Tout apprentissage va de pair avec des moments de régression, soit dans le même domaine, soit dans un domaine différent.
  • Catherine Gueguen nous avait permis de réaliser le pendant neurologique de ce constat, à savoir à quel point le cerveau d’un enfant subit des modifications incessantes : un cerveau en fait en perpétuelle réorganisation, avec des circuits à peine créés que la création d’autres circuits se fait à leurs dépens.
Nous en tirons la conclusion que ceci implique un effort supplémentaire de notre part : non seulement il est nécessaire de rappeler et réexpliquer les choses, mais aussi d’assurer à l’enfant les meilleures conditions pour assurer la pérennité des circuits neuronaux : seuls des circuits régulièrement utilisés sont maintenus / réparés, si celui qui préside au fait d’enfiler son slip tout seul est trop souvent court-circuité par une maman préférant le faire soi-même pour gagner du temps, c’est pas gagné !


Avoir une communication claire et adaptée

L’expression des limites doit prendre en compte les capacités de l’enfant, et nous comptons sur les grands principes et les petits trucs développés aussi bien par F&M que par Haïm Ginott, avec notamment, pour nous, un travail à faire sur la brièveté : clarifier l’origine des limites n’implique pas non plus d’assortir chaque rappel d’un long sermon sur l’utilité rationnelle et l’implication émotionnelle de la règle. Comme le rappelle Haïm Ginott, en situation, plus on est brefs mieux c’est. (c'est par ici pour une réflexion plus développée sur l'intérêt, ou pas, des explications pour les enfants)

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Tout un programme,...

Car il s’agit bien d’un programme, pas d’un constat sur ce que nous faisons : nous avons beaucoup de boulot devant nous, par exemple sur l’expression de la colère (chez nos enfants, mais aussi et avant tout chez nous), et sur bieeen d’autres points encore !


Cependant nous nous sentons aussi plus à l’aise car nous avons le sentiment de savoir vers quoi nous voulons tendre. (même si bien évidemment, nous savons que cela n'empêchera pas des remises en question ultérieures... ;-) )
Maintenant, il va s’agir de faire cela en mode Babysteps !


Par ailleurs dans notre évolution à venir, cette clarification nous permet aussi d’optimiser le choix de nos appuis et leur efficacité : ainsi nous savons que nous n’irons finalement pas écouter Isabelle Filliozat à son passage à Strasbourg cet automne. Certes, elle a beaucoup compté dans notre évolution, mais nous prenons à présent nos distances avec plusieurs de ses positionnements, et notamment sa manière de considérer les limites ou la colère parentale par exemple (j'y reviendrai bientôt dans un billet dédié : différences d'approches qu'on peut trouver en parentalité positive). 
  • La lire à l’occasion, pour aller approfondir ou rechercher différents points de vue : oui !
  • payer le prix (que je trouve élevé !) demandé pour la conférence ou les ateliers proposés à l’occasion de sa visite : non. 

En revanche, nous allons creuser davantage les F&M, et notamment regarder de plus près les ateliers proposés sur Strasbourg. Il y avait des possibilités en automne, mais notre automne va déjà être bien occupé et nous aimerions déjà travailler un peu par nous-mêmes. Mais au printemps peut-être  ?

5 commentaires:

  1. Intéressant ce débriefing de couple ;-)
    Bon on y passe régulièrement aussi et ça évolue ... oui parce qu'au départ on a des envies, puis on en revient au quotidien et ce que ça implique pour nous, les filles et les autres ... bref, beaucoup de réajustement selon les périodes aussi avec une trame tout de même qui ressemble fort à la vôtre!! Et puis avec un zèbre en face de soi, il faut parfois revoir ses attentes, et le l'image qu'on s'était fixée de la famille épanouie au quotidien ;-)
    En ce moment, je suis loin de la CNV, de Filliozat ou F&M tellement le quotidien peut être complexe avec ce genre de personnalité dans sa maison! Je pense faire un billet sous peu d'ailleurs!
    Sinon de mon côté, je ne crois en aucune méthode, j'y pioche à droite , à gauche, pour moi la CNV correspond le plus à mes attentes : j'écoute et j'exprime aussi mes besoins et on essaie de trouver un terrain d'entente!!
    Filliozat m'a apporté beaucoup mais j'ai fait le tour, F&M je suis convaincu quand il faut agir sur le moment mais je trouve que ça manque de profondeur (je l'ai lu il y a 5/6 ans maintenant, faudrait peut être que je m'y replonge).
    je suis persuadée que de toutes façons , tout passe par un travail personnel intérieur profond. Nous avons tellement d'héritage familial et de conditionnement de la société qu'il semble difficile de trouver une équilibre quand il faut changer radicalement sa façon d'éduquer par rapport à celle qu'on a pu recevoir ... même si c'est un long chemin, il est merveilleux d'apprentissage et de connaissance de soi même!!!
    En tous les cas, c'est chouette de cheminer à deux , en couple, et d'y réfléchir ;-)
    Bravo à vous... A tout bientôt, on en reparle de vive voix vendredi?

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    1. Ah oui tout à fait, je fixe ça ici, mais je pense bien que nous évoluerons aussi sur l'un ou l'autre point !
      Je te comprends sur l'histoire de la profondeur pour F&M, et je crois que du coup lire Haïm Ginott pourrait bien te correspondre, ça apporte la profondeur qui sous-tend les conseils de F&M ;-)

      et oui, on en reparle de vive voix vendredi, je te maile (mais on va être grave occupées vendredi si en plus y a la transmission de tout le matos reçu !!! youhouhou)

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    2. et concernant le Zèbre... oui j'ai lu en diagonale ton article, je vais m'y replonger, mais en effet, cela semble représenter un défi particulier! Dur dur de garder un cap au milieu des baffes

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  2. J'adore cet article qui aide à garder le cap !! Ca m'inspire...
    Je vois un peu 2 axes dans le 1er, mais je comprends bien l'esprit de synthèse, qui est assez fondamental pour reconnaitre ses priorités, les changements qu'on est en train d'implementer...
    Je crois que je vais aussi essayer de faire ca chez nous, j'aime !

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    1. Je suis heureuse que ça vous ait plu !
      Votre commentaire m'a fourni l'occasion de le relire, et du coup je retrouve encore ce que nous nous disions par mail : rien qu'en quelques mois, des choses ont évolué... et d'autres sont devenues plus vraies, ou ont pris une signification différente, se sont enrichies encore...

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