samedi 30 décembre 2017

La bienveillance avant 2 ans... et après.

"Les meilleurs parents du monde sont ceux qui n'ont pas d'enfants".
Ce dicton est très vrai, et personnellement je m'y retrouve tout à fait: qu'est-ce que j'étais une bonne maman avant d'avoir des gosses
J'étais pleine de certitudes, je savais précisément ce qu'il fallait faire pour gérer les enfants (des autres), et je ne me gênais pas pour juger les parents que je voyais à l'aune de ces certitudes.

Ce constat est, je crois partagé par une grande majorité de parents. 
Que celle-ci nous ait été transmise par notre entourage, où qu'on soit allé la piocher dans divers livres, articles, émissions,... la théorie semble claire.
(à ce petit détail près que la teneur de cette théorie sera très différente selon les sources auxquelles on sera allés puiser. Et d'ailleurs, entre mes convictions éducatives de quand j'avais 20 ans, et celles que j'avais toute jeune maman, il y avait déjà un monde...
Cela devrait-il nous mettre la puce à l'oreille ? 
Les choses ne seraient donc pas si simples ? 
Non, c'est simplement qu'il y a des gens qui ont raison, et d'autres qui sont aveugles, n'ont rien compris au schmilblick, bref: ont tort. 
C'est évident!).

La théorie semble claire, jusqu'au moment où elle se confronte à la pratique: l'enfant en chair et en os. 
Ses réactions. 
Les nôtres.

OK.
Mais mon expérience à moi a encore été différente, et c'est parce que j'ai lu plusieurs témoignages dans ce sens, récemment, que je ponds un billet sur le sujet.

"Les meilleurs parents du monde sont ceux qui n'ont pas d'enfants..."

Et les meilleurs parents bienveillants du monde sont ceux dont les enfants ont moins de 2-3 ans.


??

Petit retour en arrière : pendant longtemps j'ai trouvé la "théorie" autour de la parentalité positive assez facile à appliquer et à vivre
  • laisser l'enfant explorer beaucoup de choses, 
  • aménager l'environnement de manière, à la fois, à favoriser son autonomie, et à réduire le nombre d'interdits nécessaires, 
  • lui parler, 
  • mettre des mots sur ce qu'il ressent, 
  • montrer et valoriser le positif plutôt que de réprimer le négatif, 
  • "enseigner" (au sens de Jane Nelsen) avec une voix douce, plutôt que punir, frapper et/ou crier
  • ...

Vraiment, les deux premières années de F. ont été faciles à vivre
Je ne dis pas que c'est forcément le cas de tous les parents faisant ces choix éducatifs-là, en particulier pour ceux chez qui le sommeil, par exemple, pose problème. 
Mais nous faisions partie des veinards doté d'un bébé qui a espacé ses tétées et fait ses nuits très tôt, donc franchement, c'était chouette : j'étais en mesure de faire preuve d'une superbe dose de patience et d'amour en journée, et je pouvais reconstituer mes stocks sur les temps de sieste ainsi que le soir et la nuit. 
Des problèmes à gérer ma colère ? Aucun. Fondamentalement, je ne ressentais pas vraiment de colère, ayant les informations suffisantes pour comprendre les comportements agaçants de mon enfant, et savoir comment y réagir: comprenant leurs causes, je ne les interprétais pas comme dirigés contre moi, ils ne m'atteignaient ni ne m'angoissaient.
Du coup, je ne comprenais absolument pas comment des parents d'enfants plus grands pouvaient en arriver à sortir de leurs gonds avec leur progéniture.

Puis F. a grandi; 
  • sa personnalité s'est affirmée. Une affirmation, hélas, qui se fait nécessairement aussi "contre". Donc contre moi, ou en tous cas contre la manière dont je prétends régir sa vie..
  • En parallèle, ses capacités d'action (et donc de nuisance) se sont considérablement élargies. 
  • Ses horaires de sommeil (et la prévisibilité dudit sommeil - bicoz sortie du lit à barreaux) se sont eux réduits : mon temps de récupération, du coup, aussi. 
Histoire de compliquer un peu, il a eu une petite sœur, qui a puisé elle aussi dans ces fameux réservoirs d'énergie et de patience qui jusque là m'avaient semblé peu ou prou inépuisables.

Alors, ce qui semblait si naturel durant les deux premières années de F. m'a demandé peu à peu de plus en plus d'efforts
Désarçonnée par la violence des réactions de F., je l'ai également été par celle des miennes. J'ai découvert ce qu'était ma colère. Il m'a fallu développer des stratégies pour gérer cette fameuse colère parentale. J'y ai travaillé, et j'ai avancé, laborieusement.
C'est également pour cela que la découverte de Faber et Mazlish m'a tant impressionnée, aux alentours des 3 ans de F.: avec le recul, je réalise que, si beaucoup d'aspects de parentalité positive peuvent sembler assez naturels durant les deux premières années, les défis des années suivantes exigent de s'outiller de manière plus systématique, afin de réussir à naviguer en eaux agitées: concilier le respect de l'enfant et le respect de soi!

Comme expliqué en début de ce billet, ces derniers temps j'ai lu à plusieurs reprises des témoignages concordants avec mon expérience: 
  • les réactions inquiètes et honteuses de parents découvrant soudain qu'ils étaient eux aussi capables de s'énerver et de dépasser les bornes qu'ils s'étaient eux-mêmes fixées. 
  • Et aussi... des témoignages tout fiers de parents de jeunes enfants ne comprenant pas que quiconque puisse agir différemment d'eux.
Cela m'a permis de constater que je n'étais pas un phénomène isolé, et m'a poussée à analyser les causes de ce changement.

Aux premiers, je voudrais donc dire: c'est normal. 
L'enfant mûrit, il croît, et cette maturation ne se fait pas sans difficulté pour lui. Et nous, nous grandissons et mûrissons avec nos enfants. 2-3 ans, pour nous aussi, c'est une crise de maturation! D'autant que c'est généralement à ce stade que nous nous prenons de plein fouet un certain nombre de choses issues de notre propre éducation. Nous devons alors gérer à la fois les émotions de notre enfant, et celles de l'enfant que nous avons été. C'est... du sport.
Nous aimerions nous persuader que nous pouvons traverser cette époque sans erreur, mais c'est illusoire et dangereux. Stop au perfectionnisme: mêmes nos erreurs éducatives apportent à nos enfants!

Quant aux seconds... 
Les seconds m'agacent parfois un peu, je l'avoue. Mais pas longtemps, car je me souviens très bien du moment où j'étais dans leurs chaussures. 
Et je pense que cette période de sérénité est également un trésor: on constitue des stocks de réussites, on renforce sa confiance en soi et en une éducation un peu "alternative", et ces stocks-là sont bien utiles dans les périodes de turbulence qui suivent ! Ils aident à trouver l'énergie pour, toujours, reprendre le cap. 
Aux seconds, donc, je conseillerais plutôt de commencer dès maintenant à s'outiller un peu, de manière à être mieux préparés à affronter une période au cours de laquelle y aller "au feeling" fonctionne moins bien, parce que ledit feeling est chamboulé par mille émotions contradictoires et fortes.
De s'outiller mais aussi de s'entourer, parce que pouvoir compter sur des regards bienveillants de parents engagés dans des démarches similaires, c'est précieux.
Et puis aussi: de faire preuve d'indulgence envers les "mauvais parents d'enfants plus grands" ;-)



mercredi 27 décembre 2017

Couple en crise #3 : faire de la muscu

Les crises de notre première année de mariage ont été riches en enseignements, et le troisième casse des briques: 
pour qu'un couple vive, il doit se parler.
clap clap clap
oui nous avons inventé l'eau tiède, aussi.

Revenons un tout petit peu sur ce point: oui, pour vivre, un couple doit parler. 
Chacun des deux doit se dire, dire ce qu'il ressent, se confier et s'ouvrir à l'autre. 
  • C'est d'autant plus nécessaire pour sortir de la crise que cette intimité partagée constitue à la fois la meilleure incitation et le meilleur moyen de trouver une solution qui convienne aux deux.
  • Si on ne se parle pas, chacun évolue dans son coin, et c'est ce qui fait qu'à un moment, on se retrouve avec l'impression de vivre avec un étranger. "Il a changé", dira-t-on. Certes ! C'est inévitable. 
    • Mais surtout: il aura changé sans qu'on s'en aperçoive, sans qu'on soit intégré dans les réflexions qui l'ont fait changer.
    • Les deux membres du couple changent, mais la seule manière d'éviter que ces changements ne se traduisent pas par un éloignement, c'est de passer son temps à en parler.
  • D'ailleurs, je ne sais plus où j'avais lu qu'une étude avait eu lieu, où on isolait des couples de parfaits inconnus en leur enjoignant de partager le maximum sur leurs vies, le plus de choses personnelles possible, durant une heure. 
    • Au bout d'une heure, hasard, hasard, une certaine attirance se développait entre les deux inconnus. 
    • C'est ce même mécanisme qui fait le jeu des affaires extra-conjugales: avec "le nouveau"/"la nouvelle", on parle! Ben oui, on n'est pas noyés par autre chose, on peut donc se livrer sans trop de frein à THE activité qui nourrit l'attirance.

Car justement, parler, dans un couple "établi", ce n'est pas toujours facile
et c'est là notre vraie 

[Leçon n°3]

La parlotte est un muscle, à fabrication lente et à désagrégation rapide. 

C'est donc un muscle à entretenir.



Moins on se parle, plus il est difficile de se parler. Et plus il est difficile de se parler de choses profondes.
Inversement, plus on se parle, plus il devient facile de se livrer vraiment, en confiance.

Le souci, c'est qu'il suffit déjà de peu de temps sans se parler, pour que se parler devienne plus difficile: la parlotte est un muscle fragile!
Alors qu'inversement, il lui faut vraiment du temps de parlotte pour ramener les membres du couple à un niveau d'intimité suffisant pour aborder des thèmes profonds et/ou douloureux.

Notons la notion de niveau d'intimité : on peut très bien se parler, beaucoup: des enfants, du boulot, de la liste de courses. Se parler en échangeant des informations, et non se parler en communiquant sur son ressenti, ce qui nous fait vibrer, ce qui nous préoccupe, ce qui nous constitue.

Or c'est ce niveau-là qu'il faut atteindre.
Et le pire, c'est que la notion de "niveau" est très juste. 
  • Dans un jeu vidéo, il n'est pas question de passer d'un coup du niveau 1 de jeu au niveau 5 : il faut se farcir tous les niveaux de jeux pour arriver au dernier. 
  • Dans un couple, c'est pareil: il faut prendre le temps de dire 
    • des choses bien prosaïques ("faut racheter du sucre"), 
    • d'autres un peu moins ("au boulot j'ai fait ci et ça"), 
    • d'autres encore moins ("les enfants ont eu piscine et je suis inquiète car ça semble angoisser Bidule"), 
    • pour arriver enfin au stade où on peut enfin se dire ("ces temps-ci je me sens comme ci ou comme ça, je rêverais de...")
Et comme dans les jeux vidéos, si on veut avoir la possibilité d'atteindre le niveau 5, cela demande d'avoir davantage que 5 minutes à y consacrer.
Je me souviens ainsi de petites vacances à Amsterdam, il y a bieeeeen longtemps, avant que les enfants ne soient là... A la fin de ces vacances, nous n'arrivions plus à nous arrêter de bavasser: après 5 jours à déambuler main dans la main dans les rues de cette capitale, à parler, parler, et parler, nous étions lancés, tout était incroyablement fluide. [soupirs et violons]


Donc il faut du temps au couple, du temps pour parler et pour gravir peu à peu les échelons.

De ce fait, notre première année de mariage nous a poussés à mettre en place deux moyens de passer au niveau 5
- du temps pour nous: afin de nous assurer de parvenir régulièrement au niveau 5
- des raccourcis: (parce que dans tous les bons jeux vidéos, il existe des codes de triche pour zapper certaines difficultés /  passer directement à l'étape suivante), afin de nous catapulter au niveau 5 quand le besoin s'en fait sentir mais que le temps n'est pas là.

Du temps pour nous, cela a pris différentes formes selon les étapes de notre vie. Il y eut:

  • du temps au téléphone
quand, sans enfants, ma vie pro à moi me faisait passer la moitié de ma semaine dans des chambres d'hôtel. 
Nous nous assurions alors de prendre le temps d'une vraie bonne conversation au téléphone (sans film en fond). Cela nous facilitait les retrouvailles à chaque retour au bercail: nous reprenions plus facilement le fil.

  • des soirées jeux de société à deux, à la maison
pour contrer une tendance à passer nos soirées, soit chacun sur son ordi, soit ensemble en train de regarder une série. Au cours de notre deuxième ou troisième année de mariage, nous nous sommes ainsi bien marrés à nous faire l'intégrale de Friends (10 saisons, quand même!), mais l'automatisme de ce RDV devant un écran peut vite représenter un frein à l'intimité.
Jouer, ça oblige à déconnecter les appareils, et à connecter les esprits. Nous rigolions, nous nous détendions, nous parlions!
La lecture de bouquins à deux a également rempli cette fonction.

  • un resto hebdomadaire
quand, au cours de notre époque strasbourgeoise, la conjonction {Monsieur Bout a des horaires de boulot de fous + F. sait parler + les enfants se couchent mal} tua nos soirées. 
Cela nous assurait ainsi au moins une soirée en couple par semaine, un moment sans interférences pour nous parler, nous amuser, nous retrouver: la baby-sitter étant bookée, et la soirée étant fixe, cela permettait à Monsieur de la "réserver" dans son agenda pro, et à moi, de la réserver dans notre agenda familial: nous n'étions pas disponibles les lundis soirs, point! 
C'était un budget, mais comme je le dis prosaïquement à Monsieur Bout lorsqu'il me le fit remarquer: 
"ça nous coûtera toujours moins cher qu'un divorce!"
Par ailleurs, au bout de quelques semaines, un coup d’œil sur le budget nous avait incités à convenir ensemble que nous limiter, pour ces soirs, à de petits restos pas chers du tout, servirait tout aussi bien la cause sans non plus épuiser nos finances (Monsieur Bout aurait même été prêt à envisager l'option fast-food mais là c'est moi qui ai bloqué. Ceci dit si cela avait été la condition sine qua non à la preservation de nos petits RDV, je me serais montrée moins fine bouche). 
Et à la belle saison, un pique-nique ou une pizza à emporter, dégustés sur un banc dans un parc sympa, peuvent aussi faire l'affaire.

  • quelques jours de mini voyage de noces en amoureux
en laissant les enfants aux grands-parents: nous avions comme objectif de faire cela une fois par an, avec toutefois la condition que le plus jeune enfant devait être âgé d'au moins un an: quel bonheur ce fut, ces quelques jours, autour des 14 mois de F., puis, quand E. eut atteint un âge équivalent, à l'été 2016
Ce n'est malheureusement plus envisageable pour le moment du fait de certaines tensions intergénérationnelles, mais nous espérons pouvoir remplacer cela, au moins, par un weekend en s'appuyant sur d'autres personnes de notre entourage (amis, frères et sœurs)

  • du coup, nous avons remplacé cela par une journée en amoureux par trimestre
A Strasbourg, nous bookions un créneau supplémentaire auprès de notre nounou à domicile, et zou! Mais parmi nos amis, avaient aussi lieu des trocs d'enfants: ce samedi je vous prends les vôtres, et hop, on se renverra l'ascenseur une autre fois.
Nous nous sommes ainsi offert une virée au marché de Noël de Colmar, ou une journée à Europapark ...  puis, quelques mois plus tard, encore une! (parce que c'était trop bon). Nous avions également prévu une journée spa mais n'avons finalement pas eu le temps...
Malmenés par le déménagement, et des premiers mois très intenses professionnellement pour Monsieur, nous nous réjouissons: une journée en amoureux est prévue pour début janvier!


En complément de ces moments privilégiés, nous avons aussi eu recours à des 

raccourcis permettant de placer directement le curseur dans la zone "parlons de nous". 

Les deux premiers nous viennent directement de notre première année de mariage, ils ont contribué à déboucher les voies de la communication

  • "merci"
merci d'avoir rangé la vaisselle, 
merci pour ce bon repas, 
merci pour les chaussettes propres, les poubelles sorties, la facture réglée... 
Dans une atmosphère chargée électriquement, commencer par des mercis désamorce déjà beaaaaucoup de conflits! Celui qui prononce le merci fait l'effort de se mettre dans le positif, et quitte sa position d'agresseur, celui qui l'entend se sent déjà bien plus reconnu, et sort du rôle du coupable.
Dans tous les cas, cela permet bien d'éviter ce fameux piège où l'autre, et ce qu'il fait pour nous, est acquis, et où on ne voit plus que ce qui n'est pas fait...
Dans le plus profond de la vague, nous avons passé une semaine à nous focaliser sur tous les mercis que nous pouvions dire à l'autre: certes, il était important que nous soyons ensuite capables d'échanger sur nos souhaits de changement etc, mais en reconnaissant déjà tous les efforts faits par l'autre cela a pu se faire de manière bien plus apaisée! 

Aujourd'hui, nous essayons de nous en rappeler quand nous avons des reproches à formuler. Moi qui ai accueilli Monsieur avec la soupe à la grimace tous les soirs lors de nos débuts dans notre nouvelle maison, en mode "c'est à c't'heure-ci qu'tu rentres?", il m'en a fallu du temps et des efforts pour réussir à ne plus l'assommer de reproches sitôt franchi le pas de porte, puis à formuler des "mercis pour la poubelle sortie ce matin / le fruit épluché à mon intention avant de partir quand nous dormions encore". 
Et pourtant, quand l'atmosphère est tendue, entendre un merci, qu'est-ce que ça détend!! 

Bonus: c'est comme en parentalité positive, hein, relever le positif est bien plus incitatif et encourage bien plus des comportements analogues, que pointer le négatif...


  • "à quoi penses-tu?"
Haha, alors celui-là, on le connaît bien, il peut faire un gros bide. 
C'est pourquoi chez nous il obéit à deux règles du jeu très importantes

1. Il faut oser poser la question... et être prêt à entendre la réponse: chez nous, il s'agit d'un code voulant dire "je veux communiquer avec toi", donc on est en posture d'écoute
    • ni en train d'enfiler ses chaussures pour partir très vite pendant que l'autre commence à répondre, 
    • ni aux aguets pour l'interrompre au bout d'une demi-phrase "tiens ça me fait penser que...". 

2. L'autre DOIT répondre,
    • "à rien" n'est pas une réponse autorisée (ni "à rien de précis", ni "bof, des bêtises + détournement de la conversation" ). 
    • soit on pensait effectivement à pas grand chose d'important, mais même partager cela fait partie de l'intime, et nous a offert 
      • de grandes parties de rigolade ("j'étais en train de m'imaginer en train de me disputer avec la Queen sur l'éducation des enfants que j'aurais eus avec le Prince William - dialogue précis inclus"), 
      • et/ou de grands moments de découverte de l'imaginaire / du fonctionnement du cerveau de l'autre : quand on se retrouve à détricoter pour l'autre le chemin tortueux qu'a suivi notre cerveau pour nous faire passer d'un thème à un autre...
    • soit on pensait à quelque chose d'un peu plus important, et raté, on ne peut pas le passer sous le tapis, on est obligé de le sortir.  
    • très souvent d'ailleurs, chez moi en tous cas, je me retrouve à partager des soucis de l'ordre "j'ai encore 13004 choses à faire sur ma to-do list". Quand un "à quoi penses-tu" vient me piéger, je me retrouve obligée de partager mon souci et pôf, miracle, cette fameuse charge mentale dont on parle tant s'allège.
    • bien entendu, si la règle veut qu'on soit obligé de dire ce qu'on pense, on a tout de même le droit d'habiller légèrement la forme
      • on peut avoir été en train de penser quelque chose d'assez blessant pour son conjoint, à nous de trouver une manière d'en parler qui ne le soit pas. 
      • Je l'avoue sans fausse honte: j'ai déjà transformé un "j'étais en train de me rêver dans les bras d'un de mes charmants collègues" en un "je réalise qu'on n'a pas passé de temps ensemble depuis un bout de temps, ça nous éloigne". (ce qui n'implique d'ailleurs pas qu'il faille forcément se priver de la première phrase, hein. J'ai déjà fait l'expérience de la manière dont parler d'une petite faiblesse de ce genre à son conjoint suffit à ôter à cette représentation tout son aspect envoûtant. Mais encore faut-il qu'en face, cela puisse être encaissé.)


  • Plus récent, mais abondamment utilisé chez nous : "parle moaaaah" ou "on ne se parle plus / on a plus rien à se dire, faut qu'on parle!
ça manifeste l'envie d'entrer en relation, de rejoindre l'autre, et non de vivre en mode "colocation qui gère des gosses".
La dernière phrase a d'ailleurs été très fréquemment entendue ces derniers mois chez nous. 
Dite et redite sans nécessairement être suivie d'effet, elle a servi comme une sorte de jingle à la 
"toutes nos lignes sont actuellement occupées, mais nous faisons notre possible pour revenir vers vous au plus vite" (sans l'option "4 saisons" de Vivaldi...)
= une manière de nous manifester l'un l'autre que même si les vents nous étaient contraires, nous continuions à avoir envie de communiquer, et qu'un jour nous le ferions.


Et voilà... Maintenant qu'on a dit tout ça, hein, ben je vais vous dire le plus beau: c'est comme en parentalité positive, on se crée une belle boîte à outils et on ne manque JAMAIS d'occasions de s'en servir.
C'est pourquoi je suis bien, bien contente de ces vacances de Noël et du fait qu'elles me permettent de passer un peu plus de temps avec le charmant jeune homme avec qui je vis en coloc depuis bientôt 10 ans. J'm'en vas donc rouler des mécaniques et user avec lui du muscle le plus sexy dans un couple: la... parlotte, vous l'aurez compris. (nous sommes sur un blog sérieux, que diable)

J'le sens bien, y a moyen d'conclure!

mardi 19 décembre 2017

Forcer son enfant à finir son assiette: nos parents avaient de bonnes raisons!

Parmi les points sur lesquels les modes et conseils d'éducation ont beaucoup évolué, figure la question: faut-il ou non forcer les enfants à manger / finir leurs assiettes ?

Au sein de la famille Bout comme dans de nombreuses autres familles, il y a une grande différence entre ce qu'ont pratiqué nos parents envers nous, et ce que nous pratiquons à présent envers nos enfants.

"De mon temps", ça donnait globalement ça.

En ce qui nous concerne, nous n'obligeons pas les Bébous à terminer leurs assiettes
Généralement, nous les incitons à manger encore un peu, notamment lorsque nous avons l'impression que c'est simplement la hâte de passer à la suite qui les pousse à négliger ce qui est devant eux. Et quand ils demandent à être resservis, nous les poussons à s'interroger sur l'ampleur de leur faim afin que le "rab" soit dimensionné en fonction.
Mais hormis cela, une assiette non terminée est mise de côté sans commentaires, et nous passons à la suite (en revanche il n'est pas question qu'une quantité supplémentaire de cette suite vienne combler le trou laissé par une quantité moindre mangée au plat précédent).

Ce sont les options que nous avons choisies, par rapport à notre objectif: inciter nos enfants à écouter leur faim, et non à laisser des personnes extérieures à eux-mêmes déterminer les quantités qu'ils ingèrent. 
Nous aurions pu opter pour des variantes différentes: 
  • certains parents ne forceront pas leurs enfants à finir, mais déclareront que le repas est terminé. 
  • D'autres proposeront un plat alternatif, ou des menus avec options / en mode assiette à composer soi-même. 
Nos options à nous nous conviennent à nous, et c'est là l'essentiel.


Or c'est l'une des choses difficiles à vivre sur le chemin de la parentalité positive: ce chemin oblige à regarder en face l'éducation reçue, et la manière dont celle-ci a pu impacter notre manière de nous construire.

Qu'il est douloureux parfois d'accepter que nos parents nous ont blessés! Personnellement, la lecture du "Je t'en veux, je t'aime" d'Isabelle Filliozat m'a beaucoup aidée à avancer sur ce plan-là: 
  • m'autoriser à ressentir que j'avais été blessée, sans être freinée en cela par un sentiment de loyauté envers mes parents; 
  • et comprendre en même temps les raisons de leurs comportements: réaliser à quel point les manières de faire qui ont pu me blesser étaient dues aux souffrances et blessures vécues par mes parents. 
Cela m'a permis de développer peu à peu une posture pleine d'empathie
  • à la fois envers moi et l'enfant que j'ai été : oui, j'ai été blessée, et j'ai le droit de le ressentir comme tel
  • et à la fois envers mes parents : j'ai la chance (ce n'est pas forcément le cas de tout le monde), de pouvoir me dire qu'ils ont fait de leur mieux, en ayant toujours eu en tête notre bien, mais hélas, comme tout parent, avec les limitations qui étaient les leurs du fait de blessures non traitées.  
Une réflexion qui m'a aussi bien fait avancer dans mon positionnement en tant que mère, mais c'est un point que je développerai dans un prochain article.


Ce nouveau regard m'a donc bien aidée à faire la part des choses.
En revanche, cette manière de voir ne fonctionnait pas partout.
C'est le cas concernant le rapport à la nourriture: je n'arrivais pas trop à comprendre d'où pouvait venir l'injonction à finir son assiette, et les conflits monstrueux dont j'avais été témoin ou partie, dans ma famille ou ailleurs.
Et puis en réfléchissant j'ai trouvé une explication, que je partage avec vous, car elle m'a bien apaisée. Aussi pourra-t-elle peut-être vous servir aussi!

En effet maintenant, comprendre pourquoi il était logique que mes parents agissent ainsi, là encore, m'aide à
  • accepter que j'en aie souffert, et consoler mon "enfant intérieur"
  • définir une ligne d'action cohérente envers mes propres enfants, en me permettant de faire la part des choses entre mes souffrances d'enfant et mes objectifs de parents
  • regarder mes parents de manière plus apaisée, en comprenant les raisons de leur action
  • éventuellement, pouvoir également communiquer avec eux de manière plus apaisée, puisque cela me permet de sortir d'une spirale d'accusations / auto-justifications de leur part : il était logique qu'ils agissent ainsi, même si il aurait été souhaitable qu'ils fissent autrement!

D'où vient donc cette propension à vouloir à tout prix forcer un enfant à finir son assiette?
D'où?
Oh, pas loin.
Revenons quelques (dizaines de) milliers d'années en arrière.

Préhistoire.
Les Hommes fonctionnaient en mode survie
Que ce passait-il quand un mammouth était tué ? (ou un auroch, allez, puisque je ne suis toujours pas remise du choc ressenti le jour où j'ai lu que les hommes préhistoriques n'avaient probablement jamais vraiment chassé le mammouth)
On le bouffait! et le plus vite possible, s'il-vous-plait: n'ayant pas beaucoup de possibilités de conservation sous la main, et étant entourés de charognards pas forcément sympathiques, il s'agissait d'ingérer la plus grande quantité de viande possible avant que la décomposition avancée ou la concurrence d'autres carnivores ne viennent nous empêcher de terminer de consommer le fruit de la chasse.
Il était vital pour le clan que chacun de ses membres ingère un maximum de calories: qui savait quand on aurait à nouveau quelque chose de consistant à se mettre sous la dent? La vie était précaire, très précaire. 

Si un membre du clan, tenez, au hasard, un enfant, ne faisait pas de stocks assez gros, que risquait-il de se passer ? Si trop de temps s'écoulait avant qu'on ait de nouveau de quoi remplir vraiment les estomacs, 
  • il serait plus faible, et risquerait de mourir (or chaque mort affaiblit le clan), 
  • ou alors cela exigerait qu'un autre membre du clan (au hasard, sa mère), prélève sur sa maigre part de quoi compenser ce manque chez le "petit difficile". D'où affaiblissement de la mère. D'où affaiblissement du clan dans son ensemble.
Ce que je dis pour la viande vaut globalement pour un peu toute la nourriture. Manger fruits, graines, racines & Cie quand on les trouvait, sans faire la fine bouche : c'était essentiel et ce devait être la priorité de chacun!
Oui, en ces temps reculés, où le grand défi du quotidien était tout simplement de subsister, la faim ne pouvait pas être une affaire individuelle, de la responsabilité de chacun. La faim était une affaire collective, et la survie du clan dépendait effectivement, en partie, de la manière dont chacun absorbait au mieux, sans faire de chichi, les calories disponibles. Donc le clan / la mère s'ingéniait à ce que cela soit fait, et tous les moyens étaient bons.

La Préhistoire est loin.
Comme dans moult autres situations, l'enjeu de survie a pris une couverture: la politesse. De la même manière qu'en France il est "poli" de manger avec les deux mains posées sur la table (parce qu'à une certaine époque, cela permettait aux gens de manger ensemble sans se prendre un petit coup de pistolet discrètement tiré sous la table), il est "poli" de terminer son assiette, parce que cela évitera de gâcher la nourriture qui pourrait servir à la survie de son entourage.
Car, au fond, guerres, épidémies et aléas météorologiques (donc famines) aidant, la mentalité de subsistance a perduré, à juste titre, pendant des millénaires! Nos grands-parents ont encore connu les joies des tickets de rationnement.
Nos parents se sont retrouvés la génération charnière: passage d'une économie de subsistance, à une économie de la (sur)abondance.


Aujourd'hui, ce ne sont plus la famine et la mort qui guettent nos enfants (des enjeux collectifs), mais les troubles de l'alimentation: boulimie, anorexie, malbouffe (des enjeux individuels)
Aujourd'hui, il ne s'agit pas de se servir du corps de chaque individu comme d'un moyen de stocker des calories nécessaires à la survie du collectif, il s'agit de permettre à chaque individu de développer un rapport sain à la nourriture.
Les moyens pour ce faire sont évidemment très différents.
Mais c'est tout récent!
Alors oui, il est logique que nous adaptions notre rapport au nourrissage de nos enfants à ces nouveaux enjeux... comme il était bien compréhensible que nos parents aient un autre rapport à cette problématique, eux qui sortaient à peine d'une société dont les enjeux étaient tout autres.


mardi 12 décembre 2017

Tout petit pas Zéro Déchet: le vinaigre blanc aux agrumes

Il ne vous aura pas échappé que rien ne va plus dans le fabuleux monde de la Gwen: ce petit monde a été mis sens dessus dessous par un déménagement que rien ne laissait présager il y a tout juste quelques mois, et dont l'impact avait été sous-estimé: franchement, moi j'étais persuadée que dès novembre, tout baignerait dans l'huile.
Au lieu de quoi je patauge dans la mélasse.
Bon, les choses s'améliorent quand même depuis une quinzaine de jours notamment, et j'ai bon espoir. D'ici... euh... 2022, tout ira bien.

Il n'empêche que pour le moment le bilan n'est pas brillant:
  • Pause IEF forcée: personne n'a la tête à ça, et je n'aurais absolument pas le temps de préparer grand chose. Depuis notre arrivée j'ai réussi à pondre un seul truc, mes fameux chiffres rugueux.
  • Le blog aussi est sérieusement négligé
  • J'ai préparé les enveloppes pour les heureuses gagnantes du concours, mais ne les ai pas encore postées: remarquez, ainsi je découvrirai notre Poste!
  • Je ne vous parle pas du temps en couple: réduit à peau de chagrin (et encore, plutôt vers la fin du bouquin du même nom). Du coup, hein, heureusement qu'on a eu l'expérience de la crise avant, pour nous permettre de surnager en attendant des eaux plus propices au tourterellage (néologisme s'appliquant à l'action de roucouler comme des tourterelles)
  • Le ménage / Flylady aussi ce n'est pas brillant (mot-clé: travaux en cours dans la maison), même si je dois quand même à ce fabuleux système les quelques automatismes qui évitent à notre maison de sombrer dans le chaos le plus total
  • Parentalité positive: après un creux monstrueux, je regravis péniblement la pente, en me retournant quelques ongles au passage. Je vous en parlerai à l'occasion.
  • Vie sociale: je commence à m'en reconstituer une sur place, en revanche les conversations téléphoniques que j'ai pu avoir avec mes copines de Strasbourg depuis notre départ se comptent sur les doigts d'une main, merci les couchers pourris des enfants! Être ainsi privée de contacts avec plein de gens que j'adore m'attriste profondément.
  • Mais alors, si il y a bien un domaine dans lequel j'ai l'impression d'avoir régressé, c'est le ZD! Zéro Déchet mon oeil, nos poubelles se remplissent à la vitesse de l'éclair et ça m’écœure. Je n'ai toujours pas retrouvé de bonnes habitudes de shopping, encore moins un panier bio comme celui qui faisait ma joie et venait à l'occasion vous faire rigoler, je fais au plus simple, et ça m'agace, ça me gêne aux entournures, ça me titille, ça me grrrr.

Alors quand même, hein, je veux me cramponner au positif et venir vous faire part du minuscule pas ZD que j'ai MALGRÉ TOUT réussi à faire ces dernières semaines. 
J'en tire une profonde satisfaction, et je vous souhaite de ressentir la même chose si vous m'imitez, tout simplement parce qu'on a suffisamment souvent l'occasion de ne pas être satisfait de soi pour ne pas s'autoriser, aussi, à baigner longuement dans une marinade d'autosatisfaction.

Et ça tombe bien, c'est justement un peu de marinade qu'il s'agit.

Préambule: savez-vous qu'il est possible de faire l'essentiel de son ménage au vinaigre blanc ?

En tous cas, chez moi, j'ai des pschitt du genre "Swish'n Swipe" un peu partout dans la maison, remplis d'une solution de vinaigre blanc et d'eau (50/50 ou 1/3 2/3 selon mon envie du moment), à laquelle je rajoute éventuellement une noisette de liquide vaisselle (c'est vraiment une option).
Je nettoie mes sanitaires, ma cuisine, un peu tout avec ces pschitt. 
Mes sols sont essentiellement faits à l'eau (merci Jemako) mais, quand l'envie m'en prend, je vaporise un peu de mon pschitt sur le sol avant de passer. (pour plus d'infos sur tout l'intérêt d'avoir recours au vinaigre blanc, allez donc faire un tour sur cette page fort bien faite)

Bref, chez moi ce point-là était acquis, et j'avais dit adieu aux produits ménagers du commerce depuis longtemps, faisant ainsi coup double (porte-monnaie et santé disent merci, car avec du vinaigre blanc qui coûte entre 30 et 60 centimes le litre, le calcul est vite fait! Je claque aussi quelques euros dans du bicarbonate de soude et le tour est joué, ma maison est propre - enfin... si je la nettoie)
Si chez vous ce n'est pas le cas, pour le coup c'est l'occasion d'un bien beau pas ZD!

Jusqu'à présent, dans mes pschitt je rajoutais aussi quelques gouttes d'huile essentielle, pour parfumer / couvrir l'odeur assez forte du vinaigre blanc: lavandin, menthe poivrée, citron... ça dépendait de mon humeur et de ce que j'avais en stock.

C'est cela mon petit pas ZD du jour: j'ai supprimé ces huiles essentielles, et les ai remplacées par de la récupération de déchets: depuis quelques semaines, mes pschitts sont délicieusement parfumés... parce que je fais mariner des écorces d'agrumes dans mon vinaigre blanc.

C'est simplissime:
  • on mange ses agrumes (si possible bio, hein, histoire de ne pas vaporiser des pesticides dans toute sa maison ensuite), 
  • on récupère les écorces (sans trop de blanc), 
  • on les met dans un récipient en verre 
    • en verre, tout simplement pour ne pas récupérer le mauvais du plastique: je réutilise des bouteilles de jus de fruits
    • il vaut mieux les découper en petits morceaux, tout simplement afin de s'éviter de galérer pour les sortir du récipient à la fin..., 
  • on recouvre de vinaigre blanc et on laisse mijoter cela 15 jours minimum en agitant de temps en temps la bouteille,
  • puis on filtre (avec un chinois tout bête; et c'est plus pratique si on a un entonnoir), et ensuite on peut utiliser cela pour remplir ses pschitt. 
En termes de quantités,
  • 1 orange, 
  • 1 citron et demi, 
  • 1 pamplemousse ou 
  • 2 clémentines 
suffiront pour parfumer un litre de cette mixture (mais si on en met davantage c'est bien aussi!). 

Bien entendu, on peut mélanger les agrumes entre eux, obtenant ainsi un sublime "pschitt de vinaigre blanc aux agrumes" que vous pourrez trouver au rayon ménager de vos grandes surfaces pour la coquette somme de 2 à 3€, hinhinhin.
Mais en ce qui me concerne j'aime bien séparer, comme cela selon la bouteille dont c'est le tour, j'ai la joie de sniffer du citron, de l'orange, ... bref, je me régale.

Sachez que ce vinaigre peut également s'utiliser à la place de l'assouplissant dans votre machine, et parfumer ainsi votre linge en plus de combattre le calcaire. La coloration prise du fait des écorces (oui, en plus c'est joliiiiii) ne posera pas de problème à votre linge même blanc, du fait de l'extrême dilution dans la quantité d'eau utilisée par votre machine.

Voilà du coup à quoi ressemble le haut de la hotte aspirante de notre cuisine.
Cela fait un peu cuisine de sorcière (Monsieur Bout me demande ce que je conserve dans ce formol), et puis cela permet aussi de repérer les alcoolo: ce sont ceux dont les yeux brillent quand je leur montre fièrement mes bouteilles, et qui s'enquièrent, pleins d'espoir: "oh, tu fais du rhum arrangé ?!?!". 
Que d'espoirs j'ai déçus...


Mais moi, je suis ravie!

vendredi 8 décembre 2017

"plutôt que de vous opposer trop vite..." - Petit Bout de Lawrence COHEN, Qui veut jouer avec moi? #11

Parmi mes tout premiers pas en parentalité positive, il y avait déjà eu le constat de la nécessité de réduire drastiquement l'usage du "non".
  • en prenant davantage conscience des besoins et du mode de fonctionnement d'un enfant, j'avais réalisé que beaucoup de "non" sont absurdes / en contradiction avec ceux-ci: 
    • dire "non" à un câlin, quand l'enfant en a besoin pour se calmer lors d'une colère, par exemple. 
    • Ou refuser à un enfant de s'habiller seul ou d'aider à mettre la table, quand il cherche à tout prix à s'exercer et à s'intégrer à la vie du monde.
  • en travaillant sur le mode de communication, et notamment en lisant Faber & Mazlish, j'avais constaté qu'il existait beaucoup d'alternatives à ce fameux "non". En mettant en pratique ce que j'y ai appris, je fais chaque jour l'expérience de l'efficacité, souvent bien supérieure, de mille autres manières de faire respecter une limite.

Le petit bout de Lawrence Cohen qui nous occupe aujourd'hui est venu encore enrichir ma vision du "non", et de ses alternatives.
Car la citation du jour est:
"S'il veut se lancer dans une tâche [qui ne vous convient pas], plutôt que de vous opposer trop vite, vous pouvez lui dire 'Bonne idée!'  "

Issue du paragraphe suivant :
Lawrence COHEN, "Qui veut jouer avec moi ? - Jouer pour mieux communiquer avec nos enfants", p226.

Encore une fois, sa manière de présenter les choses m'a frappée: empêcher, interdire une action dangereuse, impossible, ou indésirable d'une manière ou d'une autre, ce serait donc nuire au développement de la responsabilité de l'enfant et de son esprit critique...? On le priverait de l'occasion de réfléchir par lui-même, d'anticiper des conséquences, voire de s'y confronter.

Et au fond, c'est logique! En tant qu'adulte, en tant que parent, nous avons à la fois l'expérience des désagréments possiblement causés par une action, et le souci de les éviter à nos enfants.
Mais peut-être cela nous pousse-t-il à être trop interventionnistes, et peut-être est-il bon que, de temps à autre, nos enfants en fassent l'expérience, au moins à travers cet imaginaire déjà si utile pour gérer leurs désirs...?

Concrètement, chez nous, il y a eu des applications proches des exemples donnés par L. Cohen, et j'ai apprécié la manière dont "rentrer dans le jeu" de F. permettait une inversion des rôles : à lui d'être la personne responsable dans notre duo. J'ai ainsi pu faire l'expérience, à la fois de la manière dont  le fait d'aller dans son sens
  • lui permettait, à lui, de sortir d'une logique d'opposition
  • et l'encourageait à anticiper et prendre des précautions utiles


Mais c'est dans un domaine un peu différent que j'ai particulièrement aimé comment rentrer dans le jeu de l'enfant pouvait l'amener à s'interroger sur l'intérêt de son comportement, et/ou percevoir les conséquences de sa propre logique si on la poussait jusqu'au bout.

Depuis la fin de l'été, et cela a connu sa phase la plus aigüe dans les semaines qui ont suivi le déménagement, F. a connu une période grossière bien marquée: "pipi caca prout" et j'en passe...

Les premières fois où, ainsi, il m'a dit que j'avais cuisiné du caca, j'ai contredit, expliqué, dit que cela ne me faisait pas plaisir après tout le temps que j'avais passé en cuisine. Résultat: nul.
Et puis j'ai pensé à ce passage et je l'ai appliqué:
- J'aime pas, c'est du caca!
- Oh ouiiii, j'ai cuisiné pleeeein de caca, ah oui vraiment c'est du caca!
- Euh... non non !
- Ah si, regarde, là j'ai fait du caca, et là c'est aussi du caca, et...
- Non non, pas du tout! C'est pas du tout du caca, c'est très bon, et j'aime beaucoup ça!

J'étais sur les fesses.
Et j'ai usé et réusé du même enthousiasme, dans des situations analogues, et à chaque fois c'est F. qui a de lui-même corrigé sa maman et tiré notre duo vers le haut.
Fondamentalement, être parent à deux, cela permet parfois de se décharger sur l'autre parent du rôle de la personne raisonnable... Mais en fait, pouvoir refiler cette position à son enfant, ça a du bon!

(évidemment, il y a des limites aux bénéfices de cette exagération: quand F. interpelle les gens à haute et intelligible voix "eh Madame qui pue des fesses!" (aaaah, ces grands moments de solitude que nous offre la maternité!), je vois bien que renchérir avec un "Oh oui, c'est une Madame qui pue, elle est PLEINE DE CACA!" pourrait, certes, permettre à mon gamin de se détourner de ce genre d'affirmations, mais poserait un gros, gros problème d'acceptabilité sociale #pourquoij'aipasfaitdespoissonsrouges)



Petits Bouts de Lawrence Cohen précédents: 
Mettre un terme à un jeu violent
Difficiles retrouvailles avec un enfant
Une bonne manière de jouer à la guerre (?) 
Une alternative aux câlins 
Déclarations enflammées 
Transformer une situation tendue en jeu 
Les enfants qui tentent de s'humilier les uns les autres 
De l'importance de l'éducation émotionnelle des  garçons 
Entraînement à la maîtrise de ses impulsions
Les aînés face aux plus faibles

mercredi 6 décembre 2017

Couple en crise #2 : des procédures de sortie de crise

Sur ce blog, j'aime bien faire des PPP: Petit Parallèle Pourri.
Et je trouve que Flylady se prête particulièrement bien à ce genre d'exercices, c'est pourquoi vous avez eu droit, notamment, à un PPP entre ce fabuleux système d'organisation et la parentalité positive.

En voici un, tout beau tout chaud, avec le sujet qui nous occupe aujourd'hui: les conflits et crises au sein du couple.

Parmi tous les concepts Flylady, existe celui de Hot Spot = point chaud. 
Le HotSpot selon Flylady est un point (quand je dis "un"... il est bien évident que dans une maison, il n'en existe pas qu'un, bien souvent!) sur lequel le bazar vient systématiquement s'accumuler: 
  • dessus du meuble de l'entrée, 
  • table de nuit, 
  • table de salle à manger, 
  • porte-manteau.... 
Les candidats ne manquent pas! 
On y laisse un papier à ranger, une pièce de puzzle ramassée à l'instant, une chaussette dépareillée, une pile, un chargeur,... 
Et ce magma informe grossit et se fait de plus en plus intimidant: comment s'y attaquer? On frémit rien qu'à l'idée d'y toucher.
Pour traiter ces fameux HotSpots, Flylady a une seule méthode. C'est l'objet de son Babystep n°6: tomber dessus à raison de 2 minutes. Ne pas se poser de question, ne pas faire de grands projets, mais appliquer ces deux minutes matin et soir, et faire confiance que lesdites deux minutes sont le début de la fin du Hotspot: il va arrêter de grandir, d'abord, et se résorber petit à petit, ensuite.

Une crise de couple, au fond, c'est pareil. 
Des soucis, des incompréhensions, des silences, des relents de disputes, des rancœurs s'accumulent. Comme un HotSpot ménager, ça grossit et ça envahit peu à peu tout l'espace, rendant la vie très inconfortable. On sent bien sa présence, mais franchement, rien qu'à l'idée d'aller déblayer ce truc monstrueux, le courage nous manque. Aaaaaucune envie d'y toucher: ça brûle! 
Alors, on évite de regarder ce machin, on s'évite tout court, d'ailleurs, par peur que le sujet (re)vienne sur le tapis. C'est le fameux "elephant in the room": l'éléphant est dans la pièce mais on ne peut pas en parler alors on ne peut plus rien faire.

Ça, c'est la version "silencieuse" du conflit.
Il y a aussi le conflit bruyant, le machin qui a explosé: chacun a sorti de belles vacheries à l'autre, les deux en ont pris pour leur grade, aucun des deux n'a les mains blanches, et chacun des deux a donc tout le loisir de ruminer dans son coin les torts / la responsabilité é-cra-sante de l'autre dans cette dispute... sans vouloir forcément regarder de trop près les siens propres.

Dans tous les cas, que le volcan couve ou qu'on vienne d'assister à une éruption du plus bel effet: le résultat est le même: comment amorcer la sortie de crise ?
On voudrait bien, mais on tergiverse. Comme en Flylady, on aurait besoin d'une bonne vieille routine à appliquer les yeux fermés, sans se poser de question.

Or c'est justement un deuxième fruit de notre première année de mariage ô combien conflictuelle: elle nous a permis d'élaborer

[Leçon n°2]

des procédures de sortie de crise



Des procédures de sortie de crise ? 
Oui, c'est-à-dire un code, un code de conduite, des gestes, des mots, des phrases clés, à utiliser pour nous aider à apaiser la crise.

En effet, le propre des conflits conjugaux est
  • le fait que comme toute crise, il est à la source d'émotions fortes
    • La force de ces émotions plonge ceux qui les ressentent dans un cercle vicieux. Blessé dans ses sentiments, il est plus difficile de prendre garde aux sentiments de l'autre, et de trouver les mots et les gestes permettant de calmer le jeu. On a du mal à ralentir le rythme, à bifurquer et à se frayer un chemin, le sang-froid manque pour éviter les écueils et saisir les opportunités
    • La possibilité de s'en remettre à un fil rouge pour s'en sortir est alors très précieuse : dès qu'on est capable de mobiliser une mini-étincelle d'énergie positive, on peut l'employer pour démarrer la procédure, et à partir de là on se met en pilote automatique, et on avance.
  • leur répétition / fréquence: la vie conjugale 
    • 1. fournit de  très nombreuses occasions de s'entraîner et d'arriver peu à peu à une procédure qui marche 
    • 2. rend ce travail très rentable puisque lesdites procédures pourront être utilisées trèèèès souvent ensuite

Ce fil rouge ne tombe pas tout cuit, mais notre première année nous a permis de le fabriquer, peu à peu.


Voici quelques exemples des codes auxquels nous avons recours / qui fonctionnent chez nous

En cas de dispute aigüe / engueulade:
  • Première étape : signaler sa disposition à déposer les armes en employant l'un ou l'autre (ou en combinant plusieurs) des signaux suivants
    • toucher la main de l'autre
    • émettre un très long "Pfffffffffffffffffffffffffffffffffff" éventuellement suivi d'un 
      • "on est bêtes hein?
      • "j'aime pas quand on se dispute comme ça", 
      • "On n'est pas dans la m***
      • ou "je t'aimeeeeeeeeeeuh" (en accentuant le "Meuh", au besoin en faisant les cornes. Notons que l'humour, dans une situation émotionnellement chargée, peut être dangereux du fait qu'il peut être mal interprété/vécu comme de l'ironie / moquerie par l'autre. Mais là en l’occurrence, il s'agit d'une blague codifiée dont le sens ne prête pas à confusion, donc la fonction "détente" de l'humour peut jouer à plein, sans risque)
    • "je crois que ça part en live, là.  On s'arrête et on recommence?"
    • "je crois qu'on a besoin d'un câlin" et / ou acte: long câlin silencieux avant de reprendre les pourparlers

  • Deuxième étape: reconnaître les mérites, les sentiments et la position de l'autre dans cette histoire
    • "j'ai conscience que c'est difficile pour toi"
    • "je vois que tu...."
    • "j'ai conscience que tu... as du mal à faire autrement / t'efforces de faire de ton mieux /..."

  • Troisième étape: repartir de son ressenti à soi
    • "En fait je me sens..."

La première étape a valeur d'un drapeau blanc, et introduit la reprise des pourparlers selon les modalités plus apaisées et plus empathiques des 2ème et 3ème étapes. Celles-ci se rapprochent des conseils donnés en Communication Non-Violente, même si à l'époque le concept nous était totalement étranger! 
Curieusement, aussi, depuis que Faber & Mazlish nous ont sensibilisés à l'accueil des sentiments de nos enfants, notre manière de gérer la deuxième étape s'est enrichie ;-)

En cas de problèmes larvés à la source d'un éloignement: là le processus est différent, dans la mesure où il peut arriver que l'autre partie "découvre" le problème, ou n'ait pas vraiment conscience de sa gravité / se soit refusée à en prendre conscience
  • "Je t'aime et je sens que [ce problème] nous éloigne, je ne veux pas de ça et j'aimerais travailler avec toi pour te retrouver"
également déclinable, quand il s'agit d'un sentiment diffus de désunion, en
  • "Je t'aime et je sens que nous nous éloignons, ça me fait peur, que pouvons-nous faire pour nous retrouver?"

Ces "procédures" nous sont personnelles, chacun peut aboutir à des procédures différentes, chez nous celles dont nous disposons sont 
  • d'abord issues de l'expérience "Ah, dans l'épisode 143 de nos disputes, machin a dit ou fait ça et ça a permis de...", 
  • améliorées ensuite par du travail conscient, un échange ciblé sur le thème de "dans des disputes de ce type, qu'es-ce qui, chez toi, chez moi, aide, rassure, calme, apaise ?", 
  • et renforcées ensuite par l'expérience, à nouveau: plus on s'en sert, plus elles nous permettent de dénouer des conflits, plus elles prennent de valeur: elles jouent alors pleinement leur rôle de phare dans la tempête, de signe rassurant que l'un envoie à l'autre pour lui faire part de son envie d'avancer ensemble. 
Le fait d'investir dans des moments de lecture à deux, comme évoqué dans mon billet précédent, constitue lui-même un autre de ces signaux: il s'agit avant tout de montrer à l'autre son désir de le rejoindre
On ne sait pas encore comment on va faire, mais déjà on pose une déclaration d'intention: je veux t'aimer donc peu importe la faiblesse de ce que je peux ressentir pour toi pile poil maintenant, je suis prêt à faire les efforts nécessaires pour aller au-delà d'une simple fluctuation, tout à fait normale, des sentiments
  • Non, je n'ai pas l'intention de déserter le navire en prétendant que c'est toi qui m'en as expulsé, 
  • ni de te demander de nous ramener en eaux plus calmes par la force de tes bras, 
  • je veux m'asseoir avec toi et ramer en duo jusqu'à ce que nous retrouvions une mer plus agréable. 
  • "Tu as du prix à mes yeux..."


Les fruits de cet outil chez nous ?
  • Nos crises durent moins longtemps
    • sachant mieux comment y mettre un terme, nous sommes plus prompts à le faire 
    • d'autant plus qu'ayant des expériences positives de sortie de crise en tête, nous avons davantage confiance dans le fait qu'il est possible de faire le premier pas sans perdre la face
  • Elles nous laissent, du coup, moins de temps pour nous blesser l'un l'autre / nous blessent moins profondément
  • Ces procédures renforcent notre confiance dans la solidité de notre couple: celui-ci n'est pas à la merci d'un passage à vide puisque nous avons de quoi le surmonter.
  • Et surtout: chaque crise résolue ainsi l'est parce que chacun de nous a choisi, à ce moment, de vouloir aimer l'autre au-delà de la difficulté. Chaque crise résolue ainsi renforce donc la confiance dans l'amour de l'autre : nous avons des procédures à disposition, certes, mais surtout nous pouvons avoir confiance dans la volonté des deux d'y avoir recours!

Vers l'épisode 3

dimanche 3 décembre 2017

Chiffres rugueux faits-maison (si si!)

Comme vous le savez, je ne suis pas particulièrement bricoleuse. 
Je l'ai abondamment montré (que ce soit sur ce blog, et plus encore dans la vraie vie), et jamais mes manques à ce niveau n'ont été plus évidents que lorsque je me suis lancée dans la fabrication de mes lettres rugueuses. Si vous avez besoin de vous sentir très douée (=plus que moi), allez donc lire mon récit de cet échec cuisant.
C'est pourquoi, quand il s'agit de prévoir mon budget pour une IEF plutôt orientée Montessori, j'ai prévu d'acheter, et non de fabriquer, la plupart du matériel lié.

Et pourtant, me voici à vous raconter comment j'ai fait mes chiffres rugueux moi-même!
Bon, je vous dis tout de suite, c'est en revoyant mon niveau d'exigences
  • je pense nécessaire d'être plus à cheval sur de nombreux points concernant les lettres rugueuses, car celles-ci vont être longuement manipulées avant que l'enfant n'acquière les connaissances qu'elles peuvent lui apporter.
  • F. étant déjà bien avancé dans sa connaissance des chiffres, je ne vois cela que comme un matériel d'appoint, pour
    • l'aider à acquérir vraiment leur tracé
    • servir dans les activités où on met les chiffres en correspondance avec un autre matériel (escalier de perles, barres rouges et bleues)

De ce fait, je n'ai pas cherché à assurer à ce matériel une résistance à toute épreuve ni une longévité de mammouth. J'ai privilégié la simplicité et l'usage de matériaux et techniques que j'ai à disposition et que je maîtrise 
  • papier type Canson, de couleur verte, format A5 (merci Action)
  • plastifieuse (j'ai celle d'Aldi, qui comme Lidl, en propose deux fois par an. Généralement c'est avant ou juste après Noël, soyez aux aguêts)
  • tubes de colle colorée et pailletée (achetés initialement pour la confection de bouteilles de retour au calme. Merci Action également)

Mode opératoire très long et très complexe
  • 1. Plastifier mes A5. 
  • 1bis: réaliser que je n'ai pas assez de feuilles de plastifieuses en format A5 pour faire mes 10 chiffres rugueux sur ce format, donc, après mûre réflexion, me décider à passer sur du A6 et redécouper mes feuilles tout juste plastifiées. Ceci constitue une illustration de la manière dont, quoi que je fasse, il y a toujours un grain de sable qui vient se glisser dans mes projets de travaux manuels.
  • 2. Tracer les chiffres, à la main levée, avec un tube de colle à paillettes, en étalant ladite colle afin que le tracé soit large. N'ayant pas utilisé de gabarit quelconque, il peut donc exister une variation de taille entre chacun des chiffres. J'ai estimé que ce n'était pas la mort, alors que cela m'aurait davantage dérangée dans le cas des lettres.


Le résultat est raisonnablement esthétique, tout à fait opérationnel, la différence entre surface plastifiée et colle pailletée est parfaitement perceptible, et cela m'a pris 25 minutes. Tellement facile que c'est le seul truc que j'ai réussi à produire moi-même dans le bref temps d'IEF que nous avons connu entre notre déménagement et le moment où j'ai admis que la priorité n'était pas à la reprise l'IEF, mais à l'atterrissage post-déménagement.
En revanche, il faut prévoir un temps de séchage pour la colle à paillettes.

Ces machins ont plu, j'ai simplement du rappeler à F. que non, il n'était pas question de s'amuser à gratter la colle à paillettes...

vendredi 1 décembre 2017

Couple en crise #1 : gérer la patate chaude par la lecture.

Aujourd'hui, voyons ensemble le 1er outil qui nous a permis de nous en extirper.

Leçon n°1: 

Quand ça va mal, bien mal, ou tout simplement pour tout sujet trèèès délicat, lire des bouquins peut aider


Pardon?

Eh bien oui. Lors de notre première année de mariage, la toute première chose qui nous a permis de commencer à sortir de l'ornière, fut la lecture de bouquins dits "de couple".
Pour deux raisons
  • les enseignements tirés de ces lectures
    • ben oui, et même de bouquins que nous avions lus ensemble avant notre mariage ! Certaines choses - conseils, avertissements, ... - auxquelles nous n'avions pas prêté attention avant ont pris une signification nouvelle une fois que nous pataugions bien; 
    • C'est pourquoi je compte bien revenir vous parler, dans un prochain billet, des meilleurs bouquins que nous ayons lus. Car en la matière, c'est comme pour les bouquins d'éducation: il en existe des centaines, 
      • certains sont extra, 
      • d'autres sont chouettes, 
      • d'autres encore apporteront un ou deux petits trucs, 
      • et beaucoup sont à jeter (ou recycler en matériel de travaux manuels si vraiment vous voulez rester en mode ZD. Car donner ou revendre des bouquins de couple pourris, c'est criminel)
  • mais aussi et surtout, déjà, le fait de lire ensemble.


Vous trouvez cela bizarre ?
Spontanément vous vous dites que ça ne pourrait jamais coller chez vous?
Peut-être.
Mais avant de jeter l'idée, lisez donc ce qui suit.



Qui dit période délicate et / ou sujet délicat dit sujet sensible, qui fait souffrir, qui touche au plus profond des deux membres du couple, dit donc: sensibilités à vif
Ce qui signifie qu'il est difficile, pour chacun des deux, d'exprimer son point de vue d'une manière claire, apaisée, non blessante pour la partie adverse, euh, l'autre partie, pardon. 
Et en face, il s'avère tout aussi difficile pour le conjoint d'entendre ce point de vue sans se sentir accusé, remis en question, voire agressé.

D'autant qu'évidemment, très souvent, la discussion va venir à chaud, suite à un évènement ayant mis en lumière le problème:
  • la belle-mère vient d'appeler et franchement la manière dont ça s'est passé montre qu'il faudrait mettre des limites
  • y a eu un souci avec les enfants et franchement là encore j'ai pas aimé ta manière d'agir/ne pas agir
  • on vient de s'offrir un petit moment câlin à deux et c'était encore une fois décevant
  • ...[liste interminable]

Si la discussion vient à froid
  • soit que cela vienne d'une volonté de ne pas discuter à chaud, justement pour diminuer la probabilité de conflit, 
  • soit que cela vienne d'un empêchement pratique ("chut, on va pas discuter de ça devant les enfants bon sang!" / irruption d'un voisin ou du plombier), 
les esprits n'en seront pas forcément plus apaisés: souvent, au moins l'un des deux (celui qui provoque la discussion) aura ruminé le sujet dans son coin pendant ce temps, et arrivera remonté à bloc, armé de tous ses griefs, et prêt à les exposer longuement.

En tous cas, c'était comme cela chez nous. 
Nous avions essayé de parler des sujets qui fâchaient, à chaud, à froid, à tiède, avec ou sans vinaigrette. 
Ça finissait toujours mal. 
Nous nous sommes copieusement tus, aussi. Ça n'aidait pas davantage.
Une belle alternance, une belle spirale, et peu à peu nous nous enfoncions dans le conflit et désespérions d'en trouver la sortie.

Jusqu'à ce que je commence un bouquin emprunté un peu au hasard à une voisine, que je le trouve chouette, et que je propose à Monsieur Bout de le lire avec moi. 
Ce que nous fîmes, à raison d'un (court) chapitre par soir avant le coucher.
(excellente posologie que je conseille à tout un chacun en temps de crise. 
  • Quand les symptômes décroissent, 
  • en cas de mal moins aigu, 
  • ou si il s'agit plutôt d'un traitement de prévention, 
on peut tout à fait espacer les prises à raison d'un chapitre par semaine)
Concrètement: nous lisions le chapitre "dans notre tête", et faisions des pauses à intervalles réguliers pour réagir. Dans mon entourage, d'autres ont préféré lire à voix haute.


Parler, donc, c'était la cata.

En quoi lire un bouquin de couple serait différent ? 


Oh, pas grand chose, hein.
Tout juste 7 points fondamentaux.

Un bouquin de couple / sa lecture

  • 1. amène forcément le sujet à froid (au moment choisi à l'avance pour la lecture)

  • 2. amène les sujets à froid et sans que ce soit vraiment à l'initiative d'aucun des deux
      • certes, la lecture du bouquin initial a été suggérée par l'un ou par l'autre, mais ensuite, eh bien on lit de la page 1 à la page X, et c'est la bouquin qui détermine dans quel ordre vont être abordés les différents aspects du problème. 
      • En quelque sorte, l'ordre du jour est ainsi défini par quelqu'un de neutre
        • ce qui aide chacun des deux protagonistes à l'accepter, d'une part, 
        • et à aborder le sujet du jour de manière plus apaisée, moins sur la défensive, d'autre part. En effet, pas de mauvaises intentions à prêter à un bouquin! (ou alors il faut avoir un conjoint hyper machiavélique qui est allé découper et redécoller ledit bouquin afin d'en extraire les pages qui le dérangent, et de présenter les autres pages dans l'ordre qui lui convient. Plausible?)

  • 3. contient, si bouquin bien choisi, un certain nombre de points qui viennent enrichir notre vision des choses, voire même souvent proposer une troisième voix / voie quand chacun des deux voudrait entraîner l'autre dans sa voie à lui:  des manières encore différentes de faire de ce qu'on connaît, d'autres astuces, dont l'une peut s'avérer convenir aux besoins des deux.

  • 4. dit un maximum de choses de manière beaucoup plus claire et neutre que tout ce qu'on est, à ce stade avancé de déliquescence nerveuse, capable d'exprimer. 
    • Avantage collatéral non négligeable: il est ainsi à même de venir rééquilibrer un peu les choses dans le cas fort fréquent d'un couple où l'un s'exprime mieux / davantage que l'autre: le mutique a soudainement un porte-parole, et au besoin, dans un premier temps, il peut se contenter de hocher frénétiquement de la tête à chaque phrase.

  • 5. dit ces choses d'une manière beaucoup plus facile à accueillir pour la personne susceptible de se sentir remise en question par lesdites choses. 
    • Nous-mêmes nous en avons fait l'expérience: cela change beaucoup de choses quand le bouquin exprime que "telle ou telle chose peut être importante / difficile à vivre pour un membre du couple" et que le conjoint n'a plus qu'à rebondir, simplement, doucement, en disant "ah tiens, c'est vrai que... j'en avais d'ailleurs fait l'expérience à tel moment". 
    • Rieeeen à voir avec un "T'as fait ça [insérer crime passible de la pendaison]! Eh ben c'était pas du tout ce qu'il fallait faire!" plus direct.

  • 6. Favorise, justement, le vrai partage entre époux, celui le mieux à même d'être entendu: le bouquin ayant pris le rôle du donneur de conseils / leçons, ce rôle n'est plus disponible. Ça tombe bien!
    • Chacun peut donc se concentrer sur le partage de son vécu, de son ressenti, toutes choses qui favorisent l'intimité émotionnelle au sein du couple: "en fait, moi, à ce moment, j'ai pensé cela, parce que ça m'a rappelé telle chose, d'autant que figure-toi que quand j'étais petit..." et voilà comment on se met à mieux comprendre un autre parce qu'il nous fait partager ce qui l'anime.
    • Et accessoirement, c'est une excellente école / expérience: en ce qui nous concerne, cette époque de lecture intensive nous a permis de constater concrètement que c'était par le partage de ressenti et de vécu que nous parvenions le mieux à nous rejoindre, finalement. Ce qui nous a par la suite bigrement incités à faire notre maximum pour partager ce genre de choses sans attendre la crise...

  • 7. Favorise cette intimité à plus d'un titre, du reste. 
    • J'y reviendrai dans le prochain billet, mais rien que ce RDV-lecture régulier constitue déjà un signe fort d'amour, symbolise la volonté de l'autre de lutter avec (et non contre...) nous dans cette histoire, pour que les choses avancent. Et la répétition de ces "rendez-vous de travail" montre le sérieux de l'investissement, et ancre cette démarche dans le quotidien. Elle nourrit l'espoir que la solution ne se trouvera pas en un jour, mais que nous cheminons ensemble vers elle.
    • Par ailleurs, lire un bouquin, côte à côte, c'est aussi propice à l'expérimentation d'une certaine intimité physique. Et de fait, chez nous ces moments se sont peu à peu mués en moments où s'exprimait une tendresse sinon très difficile à vivre dans un quotidien très conflictuel. Lire l'un contre l'autre, frôler sa jouer de la sienne en lisant, caresser un main ou serrer une épaule, poser sa tête contre l'épaule du conjoint, ... autant de petits riens qui ont participé au rapprochement!


Bref, pour reprendre la métaphore de mon titre: la lecture d'un bouquin de couple, c'est l'occasion de s'attaquer à une patate chaude qui nous a déjà brûlés cinquante fois, quel que soit le bout par lequel on a tenté de la saisir. 
Alors comme avec la vraie patate chaude, on met tout simplement un bon gros gant de cuisine, pour toucher au machin sans se brûler: on cherche une médiation.
Dans les cas où on en ressent la nécessité, cette médiation prendra la forme d'une personne extérieure au couple type conseiller conjugal, mais 
  • plus low-cost,
  • DIY,
  • moins intimidante, 
la lecture d'un bouquin peut déjà amener très loin! 


Chez nous, les effets "décongestionnant" du remède se firent sentir au bout de quelques soirs à peine.
Au bout de quelques jours de lecture, le cercle vicieux dans lequel nous nous sentions enfermés commençait à disparaître.

(vous noterez que cette technique nous a si bien réussi que, plus tard, c'est également ainsi que nous avons procédé pour avancer ensemble sur le plan éducatif)