Vous m'auriez dit il y a 3 ans que je ne scolariserais pas mes enfants, vous m'auriez bien fait rigoler.
Preuve de l'absence de préméditation, l'un des nombreux points ayant contribué au choix de feu notre maison-en-Normandie était la proximité immédiate (2 minutes à pied, à travers un espace vert... snif) avec une petite école maternelle/ primaire sympa.
Et puis je n'ai jamais vraiment remis en cause ma scolarité. Après tout, avec mon parcours scolaire sans anicroche, mon bac obtenu très honorablement, mes études effectuées sans détour et ayant débouché sur un emploi en lien avec elles, je représente probablement ce qu'on appellerait un produit réussi du système scolaire.
Jusqu'à récemment je ne m'étais donc jamais mêlée d'analyser d'un peu plus près la manière dont ladite scolarité s'était passée, voire de me demander si certains points pas franchement positifs quand même auraient vraiment été inévitables. Après tout "je n'en suis pas morte"...
Mais voilà, "il ne faut jamais dire jamais", gnagnagna...
Après une longue maturation la décision est ferme depuis maintenant quelques semaines :
pas d'école pour F. à 3 ans!
Jusqu'à quand ? Mystère et boule de gomme.
Voici en tous cas les raisons de notre choix d'IEF.
Bon, je vais tout de suite cafter : la première coupable de ma situation actuelle est Clotilde.
1. Par elle j'ai commencé à m'intéresser à Montessori, et du coup, une fois la pertinence de cette pédagogie confirmée par l'observation du Bébou, l'IEF a d'abord représenté une manière de faire bénéficier nos enfants de cette pédagogie
- une manière dans l'absolu, faute d'écoles Montessori dans le coin
- une manière abordable, au vu du coût de telles écoles
- une manière fiable : nous avons vite réalisé que pouvant s'intituler "école Montessori" à peu près n'importe quoi, le sigle ne constituait pas une garantie de l'attitude qui serait adoptée par les enseignants, et partant, du "montessorisme" de l'enseignement dispensé.
2. Deuxième aspect : approfondir ma connaissance de la philosophie Montessori, et notamment réaliser l'importance d'un environnement adapté à l'enfant pour lui permettre de développer son autonomie, m'a sensibilisée à la nécessité de laisser du temps à l'enfant pour exercer ladite autonomie. Cette possibilité de laisser F. vivre à son rythme, de lui permettre de s'habiller seul en 10 minutes au lieu de devoir le faire moi-même en 1 minute pour être à l'heure, constitue un point vraiment important dans notre choix de nous affranchir de l'école et de ses contraintes horaires.
3. 3ème point : Monsieur Bout et moi-même ne sommes pas toujours à l'aise avec les idéologies diffusées à travers les programmes de l'EN, la perspective d'échapper à ces influences occultes ne nous déplaisait pas.
Voici donc les 3 points qui, au départ, m'ont incitée à creuser un peu le sujet, depuis notre arrivée en Alsace, réflexion intensifiée ensuite avec la création de ce blog.
Le truc dra-ma-tique c'est que, si en creusant le sujet ces 3 points se sont vérifiés, ils sont à présent loin d'être les seuls facteurs, ni même les plus importants, dans notre décision !
Plus je creuse, plus je m'intéresse à l'IEF, plus l'IEF m'intéresse....
Oscooouurs !!!
A ces trois premiers points se dont donc, au fur et à mesure de mes/nos lectures & réflexions, rajoutées plusieurs autres motivations.
4. Avec la découverte d'Isabelle Filliozat et nos premiers efforts pour accompagner le Bébou dans la gestion de ses émotions, est peu à peu née l'envie de continuer cet accompagnement et non de laisser des cours de récréation lui mettre sous les yeux un "modèle" de gestion des tensions, des colères, des conflits, aux antipodes de ce que nous cherchons à lui transmettre.
Cela nous rend d'autant plus motivés pour passer au moins la maternelle en IEF, de manière à ce que des modes de résolution des conflits soient intégrés avant une éventuelle confrontation à la collectivité et aux charmes de celle-ci.
Par ailleurs, dans le prolongement de Filliozat, nous nous sommes intéressés à la communication non-violente, et cela nous a permis de reconsidérer certains souvenirs d'école (instituteurs secs ou cassants, cahiers déchirés ou jetés à travers la classe,...). Nous nous efforçons de ne pas crier sur nos enfants, un point auquel nous prêtons attention dans le choix de nos modes de garde actuels, ce n'est pas pour que l’Éducation Nationale le fasse "à notre place"...
5. Si Montessori a été notre chemin initial vers l'IEF, creuser ce chemin, notamment par le biais de blogs, m'a amenée à découvrir d'autres pédagogies alternatives (Steiner, Reggio, et surtout Charlotte Mason), et j'apprécie la liberté offerte par l'IEF de faire à sa sauce, de mêler les éléments de certaines pédagogies avec d'autres, le formel et l'informel, en fonction de ses affinités particulières et de ce qui semble pertinent pour l'un ou l'autre enfant.
Plus généralement, autant je n'aurais auparavant jamais remis en cause le principe d'un programme pour tous, autant j'ai maintenant très envie de pouvoir adapter les rythmes et les thèmes d'apprentissage à mes enfants, à leurs besoins ainsi qu'à leurs intérêts.
6. Mes différentes lectures m'ont aussi permis de réaliser à quel point la relation à la société, aux parents, à la fratrie, peut être différente et enrichie grâce à un quotidien IEF :
- une communication plus fluide, plus apaisée, entre parents & enfants,
- moins de compétition et plus de partage entre les frères et sœurs. L'observation lue je ne sais plus où, comme quoi les enfants ne sont plus en compétition pour l'attention des parents le soir après l'école, ni en train de décharger les uns sur les autres les tensions accumulées dans la journée, a vraiment fait "tilt" chez moi
- une meilleure intégration avec les différents membres de la société du fait
- de la participation aux activités du quotidien, permettant l'établissement de relations avec des représentants de toutes les tranches d'âge, non seulement de la leur
- ainsi que des visites / excursions permises par le moindre temps "scolaire" nécessité par l'IEF. Ce dernier point constitue, pour le coup, une motivation forte à nous investir dans l'IEF de manière durable, c'est-à-dire bien au delà de la maternelle voire du primaire. Mais we'll cross the bridge...
7. Et enfin : l'"envie" : j'adore les bébés mais en ce moment je découvre la richesse des interactions permises par les énormes progrès langagiers de F., et je trouve cette période particulièrement passionnante ! Chaque jour me permet de l'observer apprendre.
Participer à ce processus d'apprentissage, l'accompagner, le nourrir.... tout cela me semble très gratifiant. Bon, ok, dit comme ça, ça fait froid. Dit autrement, ça donne : je kiffe ! Assister à ses "premières fois", le voir s'emparer d'un mot, d'une idée, relier deux concepts entre eux...oui, ça me rend GAGA.
Et je me sentirais frustrée à l'idée de devoir sous-traiter à d'autres personnes l'essentiel de ces échanges pour me retrouver, moi, confinée à la gestion des aspects logistiques de sa vie.
Et je me sentirais frustrée à l'idée de devoir sous-traiter à d'autres personnes l'essentiel de ces échanges pour me retrouver, moi, confinée à la gestion des aspects logistiques de sa vie.
C'est en définitive cette envie qui constitue le critère de base dans notre choix : nous estimons primordial que F. et plus tard E. aient la chance d'être accompagnés dans leurs apprentissages par quelqu'un qui ait vraiment envie de les accompagner.
Puisque (et tant que) c'est mon cas, l'IEF nous assure cette motivation de l' "enseignant", bien mieux que l'EN dont nous connaissons suffisamment de membres pour mesurer à quel point de nombreux professeurs sont fatigués, désabusés, démotivés par les exigences ubuesques d'un système auquel ils ne s'identifient plus guère (je pense - entre autres ! - à une récente conversation, ô combien instructive, sur les exigences de "renotation" des copies de bac quand la moyenne obtenue est trop basse...).
Mais nous restons ouverts au fait que, peut-être, cela ne me conviendra pas ou à un moment, plus, auquel cas une école, choisie avec soin, offrira alors de meilleures garanties à cet égard qu'une maman excédée car n'écoutant pas son besoin.