Il y a un petit bout de temps déjà, quand j'avais évoqué la zébritude évidente d'E., une fidèle lectrice m'avait dit être intéressée par un billet spécifique sur les outils de parentalité positive appliqués à ces enfants au fonctionnement particulier.
Le voici, avec quelques précautions d'usage cependant.
- 1. je ne prétends absoooolument pas être une spécialiste en la matière : autant je commence à avoir bien potassé Faber et Mazlish et un certain nombre d'autres références top en parentalité positive, autant j'en suis au stade de la découverte et de l'expérimental côté zébritude.
- 2. L'étiquette zèbre en elle-même et ses spécificités : quand on creuse le sujet, on y retrouve un peu tout… et parfois n'importe quoi. Pas évident de savoir ce qui en relève : F. par exemple, est clairement hyper sensible. Est-il zèbre ? Aucune idée. Ses soucis émotionnels nuisaient jusque récemment à ses capacités d'apprentissage. Ceci semble être en train de disparaître, mais bon, de là à l'auto-proclamer zèbre... Autant le fonctionnement différent saute aux yeux chez E....
- 3. Et dans tous les cas, avant d'être (ou pas) de petits zèbres, F. et E. sont
- a. des personnes avec leurs spécificités bien individuelles
- b. des enfants, comme tous les enfants.
- Donc les quelques points que je vais partager avec vous sont très susceptibles de
- a. ne pas coller du tout avec d'autres enfants zèbres / hypersensibles
- b. coller tout à fait à un tas d'autres enfants, zébritude ou pas.
Voilà, z'êtes prévenus. Je vois ce billet plus comme l'opportunité de partager encore quelques astuces / expériences pouvant être utiles ou non à un grand nombre de familles, que celles-ci aient des rayures, des pois, ou… des paillettes !
Voyons donc voir comment certains outils m'ont aidée à gérer...
1. Les couchers difficiles de l'enfant qui a du mal à éteindre son cerveau.
Autant F. s'endort maintenant en un temps record, autant le record… est facilement dans l'autre sens pour sa sœur. Elle n'éteint pas son cerveau, a beau tomber de sommeil, elle est très souvent reprise d'un regain d'énergie phénoménal une fois couchée. Perdre du temps à dormir quand elle peut inventer 10 histoires avec ses animaux Schleich, lire 1 ou 2 (ou 5) Babar, colorier, dessiner, aller faire des raids dans la chambre de son frère endormi pour y récupérer ses jouets et ses doudous ? Ce serait trop bête. J'avais eu un espoir fou quand elle s'est mise à suffisamment bien maîtriser la lecture pour pouvoir faire cela sans gros effort, dans son lit… elle s'est endormie pendant quelques jours, en lisant. Pendant quelques jours ... et depuis raté.
2 choses qui ont pu nous aider ces derniers temps
1. Accueil des sentiments et imaginaire : passer 2 minutes à la rassurer, en disant que nous serions là toute la nuit, que nous veillons sur elle, qu'elle est en sécurité. Rajouter un "dehors les mauvais rêves" et lui demander de quoi elle a envie de rêver cette nuit ("d'un gros gâteau... à la framboise !" #tellemèretellefille)
2. Aménager l'environnement en … lestant la Bébounette : elle qui dormait depuis longtemps avec des couvertures en laine tricotée, a récemment récupérée une lourde couette que nous avions en stock dans la chambre d'amis. Le poids de cette couette semble la rassurer, la calmer, la… "poser" physiquement.
2 astuces qui pourraient aller enrichir la liste d'astuces-dodo que vous retrouverez ici.
2. La sensibilité exacerbée sur certains points.
Une chouette salle d'escalade ouverte dès 4 ans a ouvert ses portes à 20 minutes de chez nous, j'y emmène régulièrement les enfants depuis ce printemps. Parmi toutes les pistes d'escalade proposées, il en existe une, très peu haute (sur celle-là les enfants ne s'assurent pas), en mode réalité virtuelle : des machins sont projetés sur la paroi. Les premières fois où nous sommes venus, il s'agissait de petites chauves-souris, qui apparaissent et volettent sur la paroi, et l'enfant est sensé se déplacer sur le mur d'escalade pour aller les taper : quand il y parvient, un gros PAF apparaît sur le mur, et la chauve-souris disparaît, remplacée par une autre à un autre emplacement.
E. a adoré.
F. … était en pleurs parce qu'on tapait la pauvre chauve-souris. J'étais assez démunie. Ce n'est que lors du trajet retour de la deuxième séance que j'ai réalisé que je pouvais avoir recours à l'imaginaire, quand F. s'est exclamé, en pleurs
"Moi je l'ai caressée, et elle a quand même explosé !"
J'ai alors répondu
"Ah, tu l'as caressée ? Tu aurais aimé qu'à chaque caresse on voie plein de cœurs sortir et qu'elle prenne une tête toute contente ?"
F. a renchéri, s'est rasséréné, et la fois suivante, a simplement regardé le jeu de loin.
L'accueil des sentiments c'est la base de tout en parentalité positive. Mais alors avec des zèbres, c'est juste, juste, juste une question de survie !
3. La dyssynchronie
Pas évident de concilier les grandes capacités de nos enfants avec leur envie, parfois, de faire le bébé, voire le besoin affectif qui se cache derrière...
C'est assez fréquent chez E., et
- verbaliser / décrire la situation aide beaucoup "Ah aujourd'hui tu as envie d'être dorlotée et que ce soit moi qui t'habille." (le aujourd'hui est important. Il souligne que c'est un besoin momentané. Il permet aussi de laisser une porte ouverte, un autre jour, à l'expression d'un autre besoin momentané, le nôtre "le problème c'est qu'aujourd'hui, moi je n'ai pas envie / le temps, etc de t'aider". Prise en compte et respect des besoins et limites de chacun des 2 protagonistes)
- Le recours au choix et à un entre-deux m'est très précieux : "Préfères-tu mettre des chaussettes sur le parquet ou veux-tu venir mettre tes chaussettes sur mes genoux / dans mes bras ?" : ça permet déjà une posture beaucoup plus maternante que l'enfilage de chausettes assise par terre, et en même temps ça ménage un espace à l'autonomie.
4. Le besoin de prévisibilité / la difficulté face à l'imprévu.
L'an dernier a été un peu acrobatique au niveau mode de garde / gestion des enfants / jonglage avec l'activité pro de la Gwen, notamment en raison de
- variations dans les personnes en charge : nous avons eu 3 mamies au pair différentes sur cette année-là (d'ailleurs, héhé, je vous dois aussi toujours un billet sur notre bilan mamie-au-pairesque pour 2018-2019, et notre fonctionnement sur ce point pour 2019-2020 ! Mais comme je vous dois aussi des révélations palpitantes concernant Monsieur Bout, hinhinhin...)
- variations dans le planning de la Gwen : ma vie d'indépendante implique des semaines jamais identiques
Des variations qui impactaient en particulier F., dont le comportement quand il était gardé s'en ressentait, hélas.
Nous avons vu un mieux énorme à partir du moment où nous avons systématisé le recours à l'écrit : tous les dimanches soirs, j'ai pris le temps, au moment du coucher, de lui dessiner le planning de sa semaine, avec qui s'occuperait de lui quand :
- qui le lèverait et l'amènerait à l'école,
- qui viendrait l'y chercher,
- qui serait là pour le dîner,
- qui le coucherait, etc.
- (+ assorti d'un petit dessin de mon cru à colorier).
Un planning qu'il regardait avec grand soin, limite si il ne s'endormait pas avec.
Encore une fois, comme pour d'autres outils tels la roue de la colère, faire un truc moche-home-made customisé et fabriqué AVEC l'enfant rend les choses plus efficaces qu'un joli support-acheté mais du coup que l'enfant s'approprie moins.
(évidemment, vous pouvez aussi faire un truc home-made joli, SI vous êtes plus doué(e)(s) que moi - ce qui est probable, ET que vous en avez le temps : car comme ça demande d'être refait toutes les semaines, économiser ses efforts pour tenir dans la durée, c'est important aussi...)
Signe des temps (et de l'apaisement considéraaaable de F. ) : depuis la rentrée, ce n'est plus nécessaire. Mais qu'est ce que ça nous a rendu service pendant au moins 4-5 mois !
Par ailleurs, 3 autres outils made in parentalité positive me servent beeeeaucoup
I. "juste un mot" : le "hum", le "ah", sont mes grands, grands amis quand mon enfant
- fait un truc dur pour lequel il a besoin d'un encouragement sans pression : par exemple, quand F. lit, je ponctue les phrases lues ainsi. Cela montre mon intérêt, ma présence, tout en restant, par la neutralité des mots et du ton employé, bien loin de toute évaluation.
- se lance dans de graaaaandes explications plus ou moins tarabiscotées. Cela lui permet de suivre tout le fil de son raisonnement sans me coûter, à moi, trop d'efforts, ni risquer de venir interrompre ce raisonnement par une intervention intempestive.
II. Donner des renseignements
Comprendre est un tel besoin que pour certaines limites, prendre le temps d'une explication un peu chiadée, scientifique, se révèle vraiment faire une différence énorme (ATTENTION à ne pas sombrer dans un grand réquisitoire ni dans la répétition de cette explication à chaque fois, hein, cf mon billet sur les explications)
- Par exemple, à un moment où F. avait vraiment du mal à ne pas s'empiffrer de chocolat dès que nous avions le dos tourné, expliquer les mécanismes du plaisir et de l'addiction du cerveau, comment manger du sucre donne envie d'en manger encore plus, a vraiment aidé F. ... et de lui-même il a proposé de réduire la fréquence à laquelle les enfants avaient jusque là droit à une "petite douceur" (je ne m'y attendais pas, à celle-là ! ^^)
- Et, sur le même schéma, les explications sur le fonctionnement de son cerveau et de ses émotions, glanées dans les livres de Daniel Siegel dont je vous faisais l'apologie cet été, ont beaucoup aidé les enfants en situations de crise. Pouvoir s'y référer d'un simple "ouh là, là c'est le cerveau du bas qui parle ! Trouvons l'échelle !" a été très, très utile de nombreuses fois.
III. La résolution de problèmes
Cet outil, testé et détaillé la première fois pour vous il y a maintenant… 3 ans !, a été remis au goût du jour à la maison ce printemps suite à ma lecture de Thomas Gordon, dont c'est un des concepts phares. Disons le clairement : je n'y ai / avais pas plus souvent recours parce que ça me demande toujours un effort psychologique important (= en fait j'ai la grosse flemme), mais
- 1. E. est clairement arrivée dans une phase où l'implication dans la recherche de solutions l'attire beaucoup
- 2. F., sous des dehors plus réticents, y est en fait très sensible, et ces séances ont un véritable impact sur sa responsabilisation / son comportement ensuite, pour peu qu'on passe assez de temps sur l'expression des sentiments au départ de la séance.
J'ai prévu de venir vous en reparler, mais sachez que chez nous, ça a notamment été utilisé avec un certain succès sur des points très agréables (2nd, 3ème et 4ème degré Inside) tels que le fait de cracher, ou les gros mots. (en complément des approches anti-gros-mots détaillées ici).
Voili voilou pour ce petit tour d'horizon rapide, en espérant qu'il puisse servir et inspirer !!
Bien évidemment, les commentaires sont graaaand ouverts au partage d'astuces / outils similaires.
A bon entendeur… salut !