mardi 21 janvier 2020

Ce fichu réservoir d'amour à la noix

Cet automne, je me suis réjouie de voir F. démontrer un apaisement considérable. Cette évolution s'était déjà dessinée avant, bien entendu, mais l'été l'avait accentuée, et les premières semaines de la rentrée bien davantage encore.
Un enfant visiblement mieux dans ses bottes, beaucoup plus à l'aise avec les règles, la frustration, les contraintes, riant, plein d'allant, demandant allègrement de l'affection (= la demandant explicitement), capable également de beaucoup mieux supporter les moments où nous n'étions pas immédiatement disponibles pour lui donner cette affection, et dont la vivacité de réactions ne l'entrainait plus vers les monstrueuses colères qui avaient ponctué notre quotidien pendant de si longues périodes. 
Des relations s'apaisant avec un peu tout le monde (même, bien que dans une moindre mesure, avec sa sœur.)

YOUPI TAGADA.
Je chantais la vie, je dansais la vie, et puis avec la grossesse de number 3 ça tombait particulièrement bien et ça contribuait à me permettre de vivre cette grossesse avec sérénité.

Et puis fin octobre, une première colère monstrueuse comme nous n'en avions plus eue depuis… longtemps justement. Qui fut suivie d'autres, quelques jours plus tard. Des réactions de plus en plus vives, des transgressions, un retour de l'agressivité…. quelle joie que ce mois de novembre !
(revirement qui s'accentua pile-poil au moment de la visite d'un set de grands-parents - timing parfait)

AAAAAAH

A un moment, devant l'évidence et l'ampleur du revirement, il a bien fallu se poser avec Monsieur Bout et analyser un peu.
Le mois d'octobre avait été costaud : 
  • tout à ses dernières semaines de travail, Monsieur Bout était fort peu dispo, et autant ses horaires de travail avaient été raisonnables en septembre, autant ils n'avaient fait qu'empirer tout au long du mois d'octobre. Les soirs sans dîner tous ensemble s'étaient multipliés.
  • A cet important manque de disponibilité, s'ajoutait une humeur de dogue, alimentée par les angoisses liées au changement prochain
  • de mon côté, la fatigue liée à la grossesse n'avait fait qu'empirer
  • et en parallèle j'avais été d'autant plus prise professionnellement qu'avec l'imminence de la rupture de contrat de Monsieur Bout conjuguée à ma mise sur le flanc prochaine, j'avais une légère pression, quand même, pour rentrer un maximum de pépettes dans les caisses familiales tant qu'il en était encore temps.

Du coup… nous avions tiré sur la corde : le réservoir d'amour de F. n'ayant plus ce côté "percé", demandant sans cesse à être rempli, je me suis permise de passer moins de temps avec lui. De zapper son moment particulier un soir, ce qu'il a accepté avec beaucoup de bonne grâce et de sollicitude pour ma grande fatigue.
De récidiver quelques soirs plus tard.
Et de plus en plus souvent.
Et ainsi de suite.

YEP.
Nous avons (pour tout un tas de bonnes raisons) négligé ce fichu réservoir d'amour à la noix, et nous en avons payé le prix. PAF.

Je me suis bien maudite dans les semaines qui ont suivi, en voyant une partie des progrès remarqués, de la stabilisation si réjouissante, réduits à néant. Ca a d'ailleurs en partie pourri la dynamique du calendrier de l'Avent immatériel tant apprécié les 2 années précédentes.

Mais bon, plutôt que de passer toute mon énergie à me maudire, j'en ai consacré une bonne dose au remplissage à la pelle du réservoir d'amour. 
A la pelle, que dis-je ? 
Au tractopelle, oui. (ouais, j'ai mon permis de tractopelle)

Ca m'en a demandé, de l'énergie ! J'ai ressorti la totale, 
  • les câlins de malade, 
  • j'ai trouvé des variantes au jeu d'attrape (parce que vu mon volume actuel bonjour), l
  • es massages le soir dans le lit, 
  • les berceuses dès que l'envie s'en faisait sentir, 
  • les petites attentions dans la lunchbox de l'école… 
tout y est passé.
(en plus de passer beaucoup d'énergie, en parallèle, dans le rappel bienveillant, empathique et ferme du cadre)

Les choses se sont lentement améliorées, au départ, puis plus rapidement, et là depuis la rentrée de janvier j'oserais presque dire qu'on est revenus au niveau de sérénité d'octobre. 
- quasi disparition des crises (je dis "quasi" par superstition)
- diminution des oppositions
- demande équilibrée d'attention
- expression claire de besoins et de sentiments ("j'aime quand tu me masses comme ça maman")

Heureusement que dans le même temps, Monsieur Bout nouvellement au foyer faisait tout à la maison (en plus, bien évidemment, de faire sa part de remplissage), parce que lessivée que j'étais par mes mois de septembre-octobre passés sur les chapeaux de roue, j'étais loin d'être en grande forme.

Et puis à l'arrivée, les vacances de Noël auront contribué à la dynamique car en plus de nous rendre plus dispo, elles ont pu, notamment grâce aux avancées faites en ligne avec mon récent billet sur les relations aux grands-parents, exposer les enfants au regard positif de leurs grands-parents, à des expériences positives, de proximité et d'appréciation, avec eux ; ce qui a sans nul doute joué un rôle non négligeable dans le colmatage de réservoir.

Alors, franchement, j'avoue que je suis très, très heureuse d'avoir inclus mon billet spécial "temps dédié" en annexe des "200 moments" (une inspiration de dernière minute avant de lancer le BAT) parce que je viens de me prendre en pleine figure le rappel que, peu importent tous les outils de parentalité positive qu'on peut utiliser pour améliorer sa relation avec son enfant et l'aménager d'une manière respectueuse de lui et de nous, la première chose sur laquelle on ne saurait lésiner c'est ce fichu réservoir d'amour et son remplissage.

Bref, si vos enfants se comportent de manière plus relou ces derniers temps, consacrez donc vos nuits à relire l'intégrale du blog, de mon bouquin, de Faber Mazlish et consorts… ou pas, mais surtout, surtout, commencez par réintroduire, si ça a un peu disparu, ces moments si précieux pour la sécurisation affective de base de nos bambins et partant, le bien-être de tout le monde. 
Je sais que c'est compliqué souvent, 
je sais qu'on est crevé en tant que parent, 
je sais que notre vie de malade est une vie de malade (attention grand moment de littérature) 
… mais je sais aussi qu'on est tellement plus crevé quand tout part en vrille.

Je m'en suis pris le rappel en pleine tronche et je me suis dit que j'allais partager ça avec vous (parce que je partage ça plus facilement qu'une tablette de chocolat, faut dire).

Le but étant bien entendu pas de se rajouter une couche de culpabilité, hein, mais bien de se rappeler, en cas d'incendie, d'où est la sortie de secours la plus proche ….

Voilà, c'était mon appel vibrant au peuple. Bien cordialement !
Vous m'avez reconnue ? ^^

10 commentaires:

  1. Arg ce billet me parle tellement ...
    Ce soir pendant une crise avec mon grand avec mon grand de 7 ans à cause de son petit frère, j'allais encore une fois m'énerver et j'ai fini par dire " toi et moi dans ta chambre sans personne d'autre on fait ce que tu veux pendant 15min je ne prends pas mon téléphone". Il s'est immédiatement calmé, pourquoi je ne le fais pas plus souvent ? :(

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    1. J'adore le "toi et moi etc".
      Quant au "pourquoi je ne le fais pas plus souvent"... parce que… parce que tu as encore besoin de vivre la différence que ça fait plein de fois. Comme moi, à chaque fois que je m'évertue à dire à mes enfants "on va se doucher / mettre en pyj" puis d'un coup à la 4ème répétition je me dis "Ah mais attends…." et j'enchaine sur "tchoutchou die Eisenbahn" avec ma plus belle voix et en 2 secondes c'est plié, la tension est redescendue chez tout le monde, et je me dis "mais oui mais c'était si simple"...

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    2. Super article clair net explicite et si vrai 😅
      Qu'est-ce que le tchouchou DIS eisenbahn ? Vous faite tous ensemble le train pour aller au dodo ? 🚂💤

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    3. Merci ! Alors c'est cette chanson
      https://youtu.be/cCYir1s8LgE
      Et je l'utilise pour emmener tout le monde à la douche 😎

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  2. Merci pour le rappel ! ! C'est tellement vrai... et c'est vrai aussi que ça demande quand même beaucoup d'énergie ! !

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    1. OOOOh que oui ! Le seul truc est de se rappeler qu'au fond, gérer les oppositions nous en demande au moins autant, et n'aboutit pas du tout au meme résultat (court terme niveau coopération ET long terme niveau relation parent-enfant / ambiance familiale). Mais quand on est crevé c'est dur de lâcher le fol espoir d'un "je vais juste m'imposer vite fait et puis ce sera plié".

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  3. L'an passé où l'ambiance était plus que détestable, j'ai décrété une journée folie d'amour. On a fait de la peinture, chercher les qualités de chacun qu'on a écrit sur un coeur d'amour (ça doit te dire qqch), placardé au dessus de chaque lit (on les relie régulièrement). J'ai pris enfin le temps de les emmener acheter un truc promis depuis longtemps et sans cesse reporté. Et pour couronner le tout, je les ai emmené au Mac Do (oui moi ! Ils n'en revenaient pas.) Et bien cela nous a fait beaucoup de bien, a permis de diminuer d'un coup les tensions pour que moi j'ai de nouveau l'énergie de sortir de mes réactions trop vives. Et surtout cette journée fait date.
    Servane

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    1. J'adore le concept de journée folle d'amour. Je te le pique, le stocke quelque part, et le ressortirai en temps utile.
      Qqch me dit qu'avec l'arrivée prochaine de numéro3, le temps utile risque de venir plus tot que tard. Et la journée folle d'amour je la crois très compatible avec un bébé en porte bébé. Ou avec 1, 2 et 3 tous dans mon lit.
      Merci !

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  4. Merci tellement pour ce billet. J'adore vraiment votre façon de parler des choses avec humour et bienveillance. J'ai une presque grande fille qui a un réservoir d'amour percé. Votre billet m'a donné envie de faire plus d'efforts pour la combler mais sans oublier celui de son petit frère. Pas simple mais tellement bénéfique pour tout le monde
    Merci !

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    1. Merci Meugleu ! Et oui en plus on ne peut non plus oublier le réservoir d'amour des voisins. Un rappel que nous a fait E., et ses pleurs fréquents, pas plus tard qu'il y a une dizaine de jours…
      Bon chantier ;-)

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