vendredi 15 avril 2016

Education positive, Zéro Déchet... & Culpabilité

Ces derniers temps, plusieurs billets simultanés sur différents blogs (derniers en date : celui-ci et celui-ci) m'ont fait réfléchir, car venant rejoindre mon propre cheminement actuel, des discussions que j'ai à droite et à gauche avec des copines, et pour finir un article de Slate datant déjà d'il y a quelques mois mais découvert cette semaine par votre humble servante...

"je ne suis pas la maman bienveillante que je voudrais"
"j'aurais du être calme"
"je crie, je m'énerve"
...


Quel parent s'intéressant à l'éducation positive ne s'est pas retrouvé dans une situation où il a prononcé ou pensé ces phrases?

On peut reprocher à l'article de Slate dont je parlais en préambule beaucoup de choses (la manière dont il met beaucoup de choses / auteurs dans le même sac par exemple, ou son discours ayant tendance à remettre en question la validité de certains conseils du simple fait qu'ils sont mal compris / mal appliqués par une partie des gens qui les entendent,...) mais il a à mes yeux le mérite de formuler un point fort important : oui, l'éducation positive peut s'ériger en un dogme et être source d'une très (trop) grande pression pour le parent, si celui-ci n'y prend pas garde.

Être toujours calme,
    trouver toujours les mots justes,
          être en permanence à l'écoute des émotions de son enfant,
                 savoir toujours écouter son besoin,
                        fixer juste ce dont il a besoin de règles

Non mais... allô quoi ?! Vous y croyez ?

Moi pas.
Ce n'est pas "difficile".
C'est impossible.

toujours, 
jamais,
en permanence...

impossible je vous dis !


C'est un des points que j'ai beaucoup appréciés en lisant Catherine Gueguen (ouh là, d'ailleurs je n'ai TOUJOURS PAS pondu le billet prévu sur son "Pour une enfance heureuse" !) et dont j'avais discuté avec mon honorable môman.
Celle-ci, quand j'évoquais les découvertes sur l’impact neurologique de la violence verbale, des violences physiques, de certaines négligences, etc, s'insurgeait : "mais c’est hyper culpabilisateur pour le parent ! Paf, d’un geste, tu endommages un peu le cerveau de ton gosse".
Et en effet, prendre conscience de son impact de parent, de l’impact de son comportement sur le développement de son enfant, est très responsabilisant.

Mais si il y a bien une chose qui m’a fait du bien dans la lecture de C. Gueguen (dont même Slate dit du bien en cela qu'elle serait la seule à "propose[r] à ses lecteurs les références complètes des études scientifiques auxquelles elle fait référence") c’est le soin qu’elle prend de préciser que c’est la répétition, fréquente / systématique, d’un même comportement, dans la durée (plusieurs mois!) qui cause des dommages. Et que la plasticité du cerveau de l’enfant est telle qu’il existe même de grosses possibilités de rattraper, a posteriori, des périodes d’éducation pas top.


A mes yeux, ce point est essentiel, libérateur : il constitue, 
  • non pas un chèque en blanc à la « fais comme tu veux, pas grave, "personne n’en meurt" », 
  • non pas une épée de Damoclès « oooouh, si tu perds patience une fois et cries, ton enfant va être traumatisé à jamais, mauvais parent », 
  • mais une autorisation, une autorisation à cheminer.


Car c’est bien cela qu’est l’éducation positive à mon sens : 
un chemin, pas un but. 
un zigzag, pas une ligne. 
(comme la Sainteté, du reste...)

Un but, une ligne, on l’atteint, c’est binaire, on n’y est, ou on n’y est pas, et si / une fois qu’on y est on ne doit pas en bouger. On se cramponne, on ne doit pas dévier d’un millimètre, pas lâcher une seconde, c’est épuisant. C’est le « toujours, en permanence ». Et quand on lâche une fois, oh la cata ! On a failli ! On n’est pas un parent bienveillant !
Un chemin, c’est quelque chose qui nous mène d’un point à un autre, on avance, on tombe, on est loin de ce à quoi aspire, mais on avance, on y va. A chaque pas, on a cette possibilité de le faire dans la bonne direction. Parfois c’est raté, mais le pas suivant, lui, est un nouveau pas. Et si on trébuche 3 pas de suite, ça n’empêche pas le 4ème pas, fait dans la bonne direction, d’être valable pour lui-même.


C’est un peu la même chose que pour la démarche Zéro Déchet, au fond… 

Je m’y intéresse de plus en plus ces derniers temps, et en effet, comme souligné ici, le Zéro (zéro zéro ZÉRO) Déchet, ce n’est pas trop possible. Ou franchement compliqué à maintenir. C’est un idéal, un point vers lequel on tend, mais qu’on n’atteindra jamais complètement.
En revanche, on peut cheminer en mode Zéro Déchet, décider à un instant T de faire tel pas supplémentaire (apporter ses sacs en tissu pour ses courses) ; si le lendemain on achète quand même un sandwich sous emballage, les courses faites la veille avec les sacs en tissu sont-elles pour autant moins valables ? Non. Mais on pourra réfléchir à se prévoir son propre sandwich maison la prochaine fois...
Pour parler de moi (tiens ça ne m'arrive jamais ici!) : en ce moment par exemple, je commence à être tentée par le fait de faire mon déodorant moi-même, suite à mes lectures chez la mère poule, qui m'ont ensuite menée en Cabane
  • Vais-je pour autant me lancer dans la confection de ma lessive ? Non, je n’en ressens pas encore une envie suffisante = je n’ai pas encore l’énergie nécessaire, comme me l'a appris mon expérience avec Flylady
  • Mais faire mon déodorant moi-même sera toujours un pas de fait, et la présence d’un méchant bidon de lessive industrielle dans mon placard n’ôtera rien, ni à l’apport de ce déo fait-maison à la planète, ni à l'économie représentée. 
Pas à pas, je vous dis, Babysteps, petit bout par petit bout, tout ça !

Cela s’applique aussi à la parentalité : on fait ce qu’on peut avec ce qu’on est, à un moment donné
Avec ses besoins à soi, ses capacités.


Tenez, un autre exemple de chez moi, sur l'éducation, justement : mon usage de la barrière de sécurité

Depuis que nous habitons Strasbourg, j’ai investi dans un modèle me permettant, de "parquer" F. (tous les matins quand il avait entre 20 et 23 mois, c'est-à-dire les derniers mois de ma grossesse; l’utilisation de la barrière s’est faite moins systématique à présent) dans sa chambre pour jouer seul, 20, 30, 45 minutes : 
  • c’est un temps où il est tranquille, 
    • dans un environnement fait pour lui, sans aucun interdit puisque sécurisé ; 
    • il peut vider les placards si il veut, mais en tous cas il a tout l’espace pour choisir et se concentrer sur un jeu, 
    • et un espace sympa, hein, franchement il est bôôô notre appartement ;-)
    • sans être détourné de ce qui l'absorbe par ma présence, mon regard peut-être trop lourd. 
  • Et moi cela m’offre du temps pour vaquer à mes occupations tranquille, sans bambin dans mes pattes. 
Les débuts avec la barrière avaient été marqués par de fortes protestations. Protestations qui ressurgissent occasionnellement. Comment les interpréter ? Fais-je mal ?
Je n’en sais rien. J’ai tâtonné, réalisé que ça se passait globalement mieux si j’avais pris du temps pour jouer avec lui avant de mettre la barrière (rempli son réservoir d’amour, en filliozatsch ;-) ), si je l’avais prévenu qu’après viendrait le temps avec la barrière, …  Mais sans que cela ne suffise toujours.
Or à ce stade j’ai besoin de ces moments calmes ; ils m’aident à être plus bienveillante, plus calme, plus ouverte à mon enfant ensuite, parce que j’ai eu ces moments pour moi, pour d’autres choses.
Je l'utilise aussi certains soirs, quand un F. surexcité a du mal à rester dans sa chambre une fois couché : j'ai alors le sentiment qu'il a vraiment besoin de cela pour parvenir à écouter son propre besoin de sommeil, un peu comme certains enfants ont besoin d'un lit à barreaux absolument-pas-montessori.
Peut-être que je réinterrogerai cette pratique dans 3 mois, ou pour la Bébounette, ou pour mon 15ème bébé ? (euh, Monsieur Bout, si tu passes par là, je blaaaaaague)
Mais aujourd’hui, j’en suis là de mon cheminement. Et je l’accepte.


Je veux progresser jour après jour vers du mieux, vers la perfection, 
mais pas être parfaite, pas avec la pression du résultat.
Pas chercher à coller à une théorie, mais faire, aujourd'hui, ce dont je suis capable, aujourd'hui, en pratique.
Regarder le soleil, pas être dessus. 
(ouille ouille ouille c'est 'haud, c'est 'haud!)

10 commentaires:

  1. Le principal est en effet d'avancer sur un chemin auquel on aspire ... et j'ai culpabilisé longtemps départ avec les crises de ma grande qu je n'arrivais pas à gérer mais bon j'ai appris à être indulgente avec moi même , on a le droit de se tromper, on le droit d'être fatiguée, on a le droit de ne pas y arriver et on essaiera de faire mieux la prochaine fois ... le principal étant d'y réfléchir pour mieux l'anticiper ...
    Pour le ZD, on en parle partout et tant mieux, ça permet à chacun de changer un peu les choses ... c'est comme le colibris si chacun fait un petit bout, on arrivera à changer vers de belles choses.
    Ca fait des années que je m'y suis mise mais à chaque fois j'ajoute une nouvelle étape, comme tu dis, on y va petits pas par petits pas et c'est la meilleur façon d'y arriver!! Et même quelques fois, je rachète de la lessive ... et je ne culpabilise même pas ;-)

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  2. Ne pas culpabiliser, être indulgent avec soi même, c'est vrai que ce n'est pas facile dès lors qu'on aspire à une éducation respecteuse de nos enfants.
    Pour ma part, je ne culpabilise plus beaucoup lorsque je perds patience et parle plus fort que je ne le voudrais (Comprenez : pète un plomb !). J'ai conscience que c'est difficile de se contrôler, de lutter contre tous les automatismes liés à notre éducation. Et comme tu le dis si bien, l'éducation positive n'est pas but mais un chemin. Être sur ce chemin me paraît déjà être un travail énorme, mais qui en vaut la peine. Alors ne mettons pas la barre plus haute ...

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  3. merci les filles pour vos commentaires (et bienvenue chez moi Maé ;-) )
    Nawel, tu m'as trop fait rire avec ton "quelques fois je rachète de la lessive", ça fait tellement aveux de "pollueurs anonymes" ;-)
    Maé, oui, c'est tout à fait ça ! en fait je crois que c'est ce qui me gêne dans la manière dont la barre est parfois mise si haute par certains apôtres de l'éducation bienveillante : respecter l'enfant, oui, mais sans oublier de nous respecter nous-mêmes dans nos imperfections, nos maigres capacités, nos faiblesses, notre besoin de cheminer encore et toujours !

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  4. Complètement d'accord. J'avais d'ailleurs écrit un article dans le même esprit sur mon premier blog et c'est un de ceux qui me tiennent le plus à coeur. Quand je discute avec des parents qui s'en veulent et qui culpabilisent ou qui se justifient je réponds toujours "Etre parent c'est pas un état figé, c'est un chemin et le principal, c'est d'avancer".

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    1. oui voilà ! et au fond je crois que c'est un peu là que réside le problème dans le fait d'accepter que c'est un cheminement, pas un but qu'on atteint ou un "état figé" comme tu le formules si bien : on aimerait avoir été un parent parfait, que notre enfant ne puisse jamais nous reprocher le moindre manque envers eux... Mais c'est peine perdue ! Quoi qu'on fasse notre enfant aura toujours un reproche justifié à nous faire une fois adulte, on aura été trop, trop peu.
      Donc cessons de nous voir avec les yeux accusateurs de notre enfant-devenu-adulte, ou avec les yeux évaluateurs du parent-d'à-côté-qui-franchement-ne-ferait-JAMAIS-ainsi-avec-son-gamin, flûte, et regardons-nous avec les yeux bienveillants d'une personne qui dit "eh, tu t'accroches, et tu progresses, hein, mine de rien"

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    2. et je ne retrouve pas l'artiiiiicle dont tu parles sur ton ancien blog !!! un ch'tit lien, médème, s'vous plaît ?

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  5. Ne pas être parfaite, j'aime bien cette idée ! C'est mon cheminement du moment!
    Merci pour les différents liens!!!!
    Comme tu le dis dans tes commentaires, l'autre fois je me faisais la réflexion que j'aurai beau faire de mon mieux je crois qu'il me reprochera quelque chose une fois adulte quoiqu'il en soit ^^.
    Il m'arrive encore de stresser mais tout de suite ma voix intérieure surgit " petit à petit...zen..."

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  6. "L’éducation positive à mon sens :
    un chemin, pas un but.
    un zigzag, pas une ligne."
    Tout à fait d'accord avec toi. :) Et c'est valable pour l'éducation positive au sens large, c'est-à-dire pour celle qui nous fait grandir nous-même.
    Là, je viens de supprimer le message vers lequel tu as pointé... j'y ai réfléchi pendant un moment... J'avais très envie de le laisser puisque je savais pourquoi je l'avais écrit : montrer que je n'étais pas plus parfaite qu'une autre... mais j'ai reçu pas mal de messages ensuite de personnes inquiètes pour moi alors qu'il n'y avait pas de raisons de l'être... visiblement le message est un peu passé à la trappe, c'est aussi ça la notion de zigzag. Donc je pense en écrire un autre tout à l'heure (en fait j'hésite entre deux ce matin, mon coeur balance, on verra ce que ça donne dans quelques minutes-lol), un autre orienté différemment...
    Bonne journée et bonne imperfection !
    Ah si j'oubliais, au cas où ça te tente, je fais ma lessive moi-même et c'est vraiment rapide et simple : je fais bouillir 3 l d'eau puis je râpe 100 g de savon de Marseille (très grossièrement...), je mélange, je laisse chauffer quelques minutes pour que tout soit fondu et j'ajoute une dizaine de gouttes d'huile essentielle pour le parfum et voilà ! :)

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    1. Merci Isa. Zut alors pour ton article (et mon lien aloooors !!! :D) mais je comprends tes motifs. (et j'attends de voir ta publication du jour alors...)
      Oui je suis très méfiante vis-à-vis de l'autoflagellation, je pars du principe qu'elle nous prend bien plus d'énergie qu'elle ne nous en donne, et qu'au fond elle est beaucoup plus une question d'orgueil que d'humilité.
      Merci pour la lessive, c'est bien, j'ai plusieurs pistes à explorer le jour où je déciderai de m'attaquer au sujet !
      Bonne imperfection (ensoleillée, chez nous!) à toi ;-)

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    2. Ah cette suppression, c'est ma faute, ma très grande faute, ton article en perd un pied ! lol- Bon le nouvel article a pris un tour un peu différent, mais il va malgré tout dans le sens d'être bienveillant avec soi. Bonne journée !

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