mardi 11 avril 2017

Un 80% pour Monsieur !?

Le vent du changement souffle sur la famille Bout.
(ouais, le changement, c'est maintenant. 
Comment, en 2017, cette phrasounette est totalement has been
Ooooh ça va, hein, je n'ai qu'une campagne présidentielle de retard!)

Monsieur Bout est un homme merveilleux.
        Si si.
C'est un homme merveilleux qui bosse merveilleusement bien. 
       (bien que trop longtemps à mon goût. Passons) 
C'est donc un homme merveilleux dont la carrière a toujours merveilleusement bien progressé. 
      Or l'avantage d'une carrière et d'un salaire en progression constante, c'est que cela aide à envisager avec une certaine sérénité la diminution voire cessation d'activité de l'autre membre du couple.

Malheureusement, c'est aussi un homme merveilleux qui n'a jamais trouvé son job merveilleux

Jamais.
Je suis bien placée pour le savoir: l'ayant épousé avant même qu'il ne commence à bosser, je l'ai quasiment toujours entendu se plaindre de son boulot. 
Oh, il a trouvé des choses intéressantes. Notamment en début de poste, quand tout est à apprendre. Mais même à ces moments, la question du sens est demeurée.
Et si je fais un ratio entre soirs "Monsieur Bout rentre content de sa journée en particulier et de son job en général" et "Monsieur Bout rentre et exprime longuement sa frustration concernant les deux éléments précités"...
Le ratio n'est pas merveilleux.
    Ni même bon.
           Ni même...
                    Acceptable.

Et cela fait des années que ça dure.
Oh, au départ, nous trouvions d'excellentes raisons à ces frustrations : c'était le début, les premiers jobs, fallait faire ses preuves, une fois qu'il aurait grimpé ce serait plus intéressant. Monsieur Bout a du reste fréquemment évolué, mais le job qui devait suivre est toujours demeuré plus intéressant.
Et les frustrations persistent alors même que le contexte actuel est en lui-même idéal: chouette entreprise, chef avec lequel il s'entend merveilleusement bien, collègues adorables, ambiance bienveillante. Que demande le peuple.

Et ces temps-ci, cette insatisfaction se traduit également par une grande frustration vis-à-vis du temps pris par un autre gros boulot de Monsieur Bout : son boulot en tant que père
C'est que c'est chronophage des Bébous !
Ces petites bêtes ne laissent plus énormément de temps à Monsieur Bout pour faire des trucs qui l'épanouissent personnellement.
Et nous en arrivons à ceci:
Le samedi après-midi, F. se réveille après deux bonnes heures de sieste.
Monsieur Bout lève le nez d'un bouquin sur un sujet qui le passionne vraiment (et qu'il lit donc depuis deux heures) et s'exclame, exaspéré : "Déjà ! Mais on n'a jamais le temps de lire avec des gamins !"

Situation répétée tous les week-ends. Et ce n'est qu'un exemple. 

Monsieur Bout est d'une patience d'ange avec ses enfants, mais à force de piétiner ses propres besoins, la corde s'effiloche.

Aussi ai-je fini par m'en inquiéter, et saisir le taureau par les cornes.
J'ai proposé à Monsieur Bout de passer à 80%.
Réaction du Monsieur
"Hein, quoi ?! Nan, mais, on peut pas se le permettre financièrement."
Réaction de la Gwen
"Oh ben oui, c'est vrai ça. 
Nous investissons de l'argent dans l'épanouissement des enfants : IEF, activités, mode de garde, ... 
Nous investissons de l'argent dans l'épanouissement de la Gwen : pause pro, nounou à domicile, femme de ménage, sorties diverses sur mes moments off,...
Quant à toi, oh ben oui c'est logique, toi t'es juste là pour ramener les sous qui permettent à tout ce petit monde de s'épanouir."

Petit blanc dans la conversation.
Puis j'ai remis 100 balles dans la machine :
"A mes yeux, si tu continues comme ça, c'est soit la dépression, soit le burn-out, soit le pétage de plombs total où tu partiras élever des chèvres dans le Larzac en compagnie de la première blondasse venue. Scénarios qui nous coûteront bien plus cher que toute décision pro que tu pourrais être amené à prendre."

Je vous passe les longues conversations qui ont suivi.

Il en ressort deux choses
  • A court terme : afin de rééquilibrer dès à présent sa vie entre "je fais des choses qui m'épanouissent et me nourrissent" et le reste, Monsieur Bout termine de se faire à l'idée de demander un congé parental à temps partiel (à 80%) à dater du 1er septembre. Son jour off lui permettra de suivre une première année de licence en enseignement à distance, dans un domaine qui le passionne (il ira donc passer cette journée à la Bibliothèque histoire qu'elle ne risque pas d'être phagocytée par les enfants et les exigences de la vie domestique)
  • A moyen terme : Monsieur Bout est sur le point d'entamer un coaching pour réfléchir à une éventuelle réorientation plus ou moins totale de sa vie pro; une réorientation qu'il mettrait ensuite en œuvre d'ici 2, 3, 4 ans... selon ce qu'elle impliquerait.

Ce qui se traduit par des conséquences financières
  • A court terme : nous devons nous préparer à faire avec 20%  en moins sur son salaire, de loin notre plus gros revenu, et à terme, probablement notre seul vrai revenu.
  • A moyen terme : il n'est pas improbable que, d'ici quelques années, son revenu ne baisse encore davantage, ses réflexions actuelles le portant plutôt à envisager des fonctions considérablement moins rémunératrices que celles qu'il occupe actuellement. 
    • (euh, ne lisez pas ce que j'écris en vous imaginant un salaire à 6 chiffres avec voiture de fonction. 
      • Monsieur Bout n'est pas trader. Monsieur Bout n'a pas, comme quelqu'un en vogue ces temps-ci, bossé plusieurs années pour Rothschild. 
      • Mais Monsieur Bout est cadre, dans un poste à responsabilités, dans un grand groupe international du secteur privé; donc statistiquement, il existe bien plus de jobs moins bien payés que de jobs mieux payés que le sien. 
      • D'autant qu'il n'envisage pas de reconversion en tant que footballeur professionnel ou star de la chanson. Quel dommage). 
    • Nous devons donc nous préparer à faire, d'ici quelques années, avec bien moins que son salaire actuel diminué de 20%. Et avec considérablement moins que le salaire que nous anticipions être son salaire futur...
    • Ce qui implique de nous serrer la ceinture dès maintenant, histoire de profiter quand même du temps qui lui resterait à son job pour mettre de côté de quoi gagner en liberté de décision si il s'avère nécessaire de sauter le pas et d'aller vers l'inconnu.

Ce qui se traduit par de profondes réflexions conjugales sur notre niveau de vie.

Issus tous les deux de familles où on ne nageait pas dans l'or, nous savons qu'il est possible de vivre tout à fait correctement avec des revenus bien inférieurs à ceux qui ont été les nôtres.
Mais depuis le temps que nous vivons avec ces revenus, nous nous sommes bien habitués au confort d'un certain niveau de vie. Sans complexes, sans trop nous poser de questions, puisque nos revenus ne devaient pas cesser d'augmenter.

Mais ça, c'était avant.

Nous avons donc d'intenses discussions.
  • Nous remettons un peu tout sur la table, les petits comme les grands choix, ce qui est un peu flippant, il faut l'avouer : mon avenir pro, l'IEF, nos choix de logement,... tout y passe.

Ce qui se traduira, ici, par la naissance d'une nouvelle catégorie : Optimiser le budget (en tous cas c'est le titre de travail que je trouve. Peut-être quelque chose d'incomparablement plus sexy me viendra-t-il plus tard, nous verrons). Je viendrai partager les pistes que nous identifions, et sans doute recueillir vos astuces.
Je précise toutefois qu'il ne s'agit pas de faire pleurer dans les chaumières.
Nous n'allons pas brusquement sombrer dans une misère noire, nous retrouver dans les 10% les plus mal lotis de France, ou quoi que ce soit d'approchant. Nous avons conscience que notre situation restera encore enviable par beaucoup d'autres. 
Peut-être même que ce que j'appellerai "des économies" pourra faire sourire (au mieux) ou agacer (moins bien) l'un(e) ou l'autre d'entre vous pour qui cette "économie" ressemblera plutôt à du luxe. J'en suis consciente et vous prie par avance de me pardonner. Je l'évoquais déjà ici, en matière financière chacun voit midi à sa porte.

En ce qui nous concerne, nous allons tout de même devoir reconsidérer un certain nombre de choses.
L'occasion de distinguer
  • l'essentiel (pour nous... et la notion d'essentiel dépend quand même toujours un peu de la taille du porte-monnaie qui doit le financer, cet "essentiel"), 
  • du superflu (pour nous), 
et d'opérer un tri à la fois exigeant, libérateur et ... qui fera mal aux fesses.
Voilà !


Il s'agit BIEN ÉVIDEMMENT d'une photo de Monsieur Bout.


6 commentaires:

  1. Pas facile cette question des sous sous !
    Et plutôt courageux d'en parler sur le blog, c'est encore tellement tabou.
    J'aime bien les scénarios catastrophes !
    Plus sérieusement, une réorientation professionnelle n'est pas si aisée que celà. C'est même quelque chose qui m'interroge beaucoup à l'heure actuelle... Il y en a tellement ! Comment vais-je aider les enfants à bien choisir leur métier ? (On n'en est pas là mais je suis quasi sûre que l'ouverture donnée dès petit conditionne un peu ce choix)
    Sinon il faut que je réponde à ton mail mais grosse fatigue ce soir.
    Servane

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    1. Oh que oui, les sous c'est tabou, mais en tant que RH ça m'horripile : je suis bien placée pour constater qu'en parler serait bien plus sain !

      Oui l'orientation pro est une vraie question !! Tellement difficile de ne pas projeter des choses sur son enfant... et comme tu le dis, en effet, plus j'avance plus je me dis que ça peut se jouer dès très jeune.

      T'inquiète pour le mail ;) je te lirai avec grand plaisir mais laisse toi le temps qu'il faut !
      bise
      Gwen

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  2. Bravo pour cette prise de conscience! Il en va de la santé de Monsieur Bout, de la tienne et des enfants. Il semble avoir accepté cette éventualité, ce n'est pas simple surtout lorsque nous sommes un homme dans notre belle société... Hum hum.
    Et pour le côté financier, si tu savais comme je déteste cette société qui pointe les "trop riches" mais aussi ceux qui bénéficient d'un coup de pouce de la société. Ça me gonfle.

    J'ai l'impression de me voir dans Monsieur Bout (sans le métier à responsabilité et tout ce que ça implique), dans ses besoins qui ne sont pas respectés. Ma réaction au réveil de la sieste est similaire comme tant d'autres choses... Pourtant je suis à 80%. Mais voilà, cette vie m'étouffe. Un bébé va agrandir la famille. La question du cp s'est posée. Échec. L'amoureux a un salaire beaucoup trop précaire. Il s'est installé avec tout ce que cela implique. Mi-temps. Pareil. Et puis si c'est pour courir partout avec 2 enfants pour rien, non merci. Il reste le chômage... Le seul qui nous (me !) permettrait de ne pas finir interdit bancaire. Sauf que voilà, je travaille dans l'entreprise familiale et cela risque d'éclater avec eux si je fais ce choix. Pourtant là, aujourd'hui, je me sens si oppressée et pas respectée dans les besoins que cela se répercute sur notre fils. Bref, le changement, chez nous, n'est pas pour tout de suite (malheureusement...).

    Bergamotte

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    1. Hello Bergamotte

      Oui Monsieur Bout a mis du temps à accepter cela, mais là ça y est je pense, il arrive à saturation et le perçoit. Lui qui avait toujours estimé qu'un temps partiel était inenvisageable, se prépare doucettement à le demander, et s'en réjouit déjà.

      Haha, je te rejoins sur le gonflage / pointer gens trop riches / coup de pouce. D'autant que maintenant nous réussissons le tour de force d'être à la fois trop riches d'un côté, et de bénéficier d'un coup de pouce. Tout pour plaire !

      Ah l'amoureux s'est installé ? hum, encore un changement...
      Argh pour l'entreprise familiale, c'est vrai que ça complique quand les différentes sphères sont mêlées ainsi... pas moyen d'en parler / exposer les besoins que tu aurais ? (sans commencer par dire que tu veux te barrer, mais partir des besoins, pour une petite démarche de résolution de problèmes...)

      Je mesure le gloups chez toi... ça a fait un peu pareil quand récemment, Monsieur Bout a semblé supposer qu'il pouvait compter sur le fait que d'ici 2-3 ans, je reprendrais un boulot quasi à temps complet. S'en est suivie une discussion sur nos choix familiaux, mes besoins à moi, le fait que les siens étaient importants mais que si leur prise en compte aboutissait à la négation des miens et au déplacement total des priorités que nous avions eues pour notre famille, ça faisait ptet cher payé et qu'il allait falloir trouver des solutions intermédiaires...

      Bon courage et aussi beaucoup de force pour cette grossesse (pour quand ?)

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  3. Et suspendre le temps13 avril 2017 à 11:24

    Waouh... De gros changements en perspectives (encore!!), on ne s'ennuie jamais chez vous haha.
    Trêves de plaisanteries, c'est vrai que trouver l'équilibre personnel et familial est un vrai challenge de nos jours, car tout est finalement possible et c'est à chacun de prendre ses responsabilités en plus de se soutenir les uns les autres.

    Monsieur Bout semble effectivement avoir besoin de temps pour lui afin de se ressourcer et être disponible pour sa famille. L'argent étant toujours le nerf de la guerre malheureusement...

    Ici par exemple, je vois bien que mon homme n'aime vraiment pas du tout la perspective d'être le seul responsable pour rapporter l'argent du ménage, c'est trop de responsabilité et de stress pour lui. C'est pourquoi c'est un gros sujet dans la façon dont nous envisageons l'IEF. Si nous sautons le pas, pas question pour autant que je n'apporte pas une part des ressources pour notre famille, même si celle-ci serait évidemment beaucoup moins importante qu'actuellement... L'idéal dans ma tête serait un 2/5e mais je ne suis même pas sûre que ça existe lol. Et encore moins si c'est possible dans mon secteur... En fait, pour être honnête, l'idéal de l'idéal serait qu'on puisse chacun faire un mi-temps et du coup faire moitié-moitié pour l'IEF aussi! Mais là je crois que je rêve tout haut... Enfin bref, ton billet alimente ma réflexion comme tu vois ;)
    De notre côté aussi, nous n'avons pas à nous plaindre de notre confort de vie actuel, qui comme chez vous est bien meilleur que celui dans lequel nous avons grandit. Donc nous savons aussi qu'on peut tout à fait vivre convenablement avec moins, mais c'est quand même moins chouette :p Et comme tu le dis si bien, il va falloir reconsidérer en profondeur nos priorités pour notre vie de famille et nos épanouissements individuels.

    Et puis par moment, je me demande pourquoi faire l'IEF par rapport aux écoles à pédagogies alternatives. Un type d'école qui m'attire vraiment beaucoup, ce sont les écoles type Sudbury ou écoles démocratiques. Je me demande d'ailleurs ce que tu en penses? Je me dis que c'est encore le meilleur compromis entre IEF et école (enfin, pour les gens qui comme moi sont très attirés par le unschooling quasi radical et les apprentissages autonomes évidemment, puisque c'est le principe de ces écoles).

    Voilà, c'est encore un commentaire à rallonge :DDD

    En tout cas, j'admire que dans votre famille vous osiez prendre ces décisions difficiles et changer complètement votre façon de vivre! C'est un bel exemple.

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    1. Coucou !
      Ah oui en effet chez vous aussi de la réflexion en profondeur... ;-)

      Ces histoires de temps partiel sont vraiment compliquées, surtout que l' "existence" de formules de style 2/5è dépend vraiment de la culture : du pays et/ou du secteur/entreprise ... y a des pays où le temps partiel est bien plus répandu qu'en France (et qui sont donc bien mieux habitués à fonctionner avec des formules un peu personnalisées. Les pays nordiques me font rêver...). Tu vis à Londres en ce moment c'est cela ? Je ne sais pas trop quelle est la position des Grands-Bretons vis-à-vis des temps partiels ?

      Écoles alternatives : oui ça me ferait rêver... ceci dit personnellement, étant moins axée sur l'unschooling radical, je suis aussi moins fan des écoles démocratiques. Il y en a une en projet près de chez moi, mais je ne me vois pas y mettre mes enfants.
      Mais une vraie bonne école Montessori... aaaah. Je m'fais du mal. L'IEF n'ayant pas que des avantages, il est sûr que nous réfléchirions sérieusement si nous avions, à proximité, une solution "école" un peu différente.

      Bonnes réflexions !!

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