Nos premières expériences s'étaient fort bien passées, et nous avaient amenés à privilégier un système assez nouveau mais fichtrement attirant : les mamies au pair.
Qu'est ce qu'une mamie au pair ?
Une dame d'un certain âge, forcément (globalement à partir de la cinquantaine et on trouve encore des personnes septuagénaires depuis longtemps)
qui va généralement être en retraite, ou en tous cas être libérées de ses obligations professionnelles : par exemple, ex-maman au foyer dont les enfants ont quitté le foyer
souvent célibataire (veuve, divorcée, etc), mais pas toujours : il y a aussi souvent des accords entre conjoints pour permettre à Madame d'aller, pendant quelques mois de l'année, assouvir une soif de voyages et d'aventures que Monsieur ne partage pas
libérée, également, de ses obligations familiales : enfants grands ayant quitté le foyer, pas encore de petits-enfants, ou des petits-enfants habitant loin donc qu'elle ne voit que peu, ou encore des petits-enfants déjà grands donc qui ne tiennent plus forcément à aller déjeuner une fois par semaine chez mamie
encore en forme, et ayant envie de découvrir le monde et de se sentir utile
n'ayant pas envie de découvrir le monde sous la forme d'un circuit de 8 jours d'autocar avec d'autres seniors, mais de s'imprégner de la culture, de s'intégrer dans un pays, de goûter à la vie là-bas (l'aspect financier joue également un rôle, notamment dans le cas de destinations lointaines)
Le principe est donc de venir habiter dans une famille, et en l'échange d'un soutien, notamment dans la garde des enfants, d'y être nourrie, logée, voire un peu rémunérée; et, également, entourée.
Chouette système.
Suite à notre première expérience absolument merveilleuse, une valeureuse commentatrice de ce blog avait attiré mon attention sur l'existence de sites Internet spécialisés dans la mise en relation de "grannies au pair" avec des familles désireuses d'en accueillir. Une sorte de Meetic du 3ème type ...
Whouhou ! Je me jetai tete baissée dans l'aventure.
Ayant tiré un certain nombre de leçons de cet épisode malheureux, je repartis à la charge, en vue d'accueillir quelqu'un de la fin aout à la fin novembre (notre G1 revenant début décembre - oui, elle est chez nous en ce moment, la vie est beeeeeelle), bien décidée à mieux faire.
Je pris mon temps, je discutai longuement éducation (notamment en envoyant un article de blog - non, pas du mien - résumant à mon sens vraiment bien les points qui nous tenaient le plus à cœur ; ce qui déclencha une discussion approfondie et très intéressante).
Bref, vraiment, j'avais fait gaffe. J'étais très confiante. Avec cette G3, ça ne pouvait que bien se passer, j'avais pris toutes mes précautions !
Les 2-3 premiers jours furent effectivement idylliques.
Je planais sur mon petit nuage, je me sentais la maman la plus sioux du monde
(je pré-rédigeais déjà dans ma tête le billet à la gloire du système dont j'allais vous régaler - un peu comme celui au sujet des Fleurs de Bach, vous vous rappelez?).
Ah, là, là, franchement, quelle belle organisation.
Et puis…. la situation partit en vrille : subitement, F. prit G3 grippe et partit à l'attaque en mode "guerre totale" (insultes, cris, colères, bêtises de fous : genre à étaler de la crème solaire sur les vitres, un truc jamais vu chez nous).
Au bout de 2 jours à les garder, elle disait qu'elle n'était pas venue pour ça et parlait déjà de repartir.
AAAAaaarggggghhh
J'étais d'autant plus embêtée que, comme je considérais que ça ne pouvait pas être lié à elle personnellement, cela voulait dire que c'était du à F. / incompatibilité entre le fait d'accueillir quelqu'un et F. Je la voyais faire des efforts pour rentrer en contact avec F. et se prendre des râteaux répétés, c'était la joie.
Du coup, la solution que je trouvai en urgence, pour à la fois ne pas lâcher l'affaire, et ne pas me retrouver d'un coup sans possibilité de travailler, fut de limiter les missions de G3 à la garde d'E., en attendant qu'on ait trouvé ce qui n'allait pas avec F. Solution provisoire qui dura…. 8 semaines.
8 semaines ultra stressantes puisque F. se comportait de manière très hostile avec elle, même en notre présence, et que de mon côté je devais jongler entre mille solutions pour faire garder F. après l'école les jours où mon activité pro m'empêchait d'aller l'y chercher.
Ambiance !
Au fur et à mesure, la vie en commun fut de plus en plus difficile à vivre pour tout le monde
évidemment, pour elle, puisqu'elle se prenait l'animosité de F. en pleine face, qui ne ratait pas une occasion de lui balancer une petite phrase désagréable. Et elle ne manquait pas une occasion de souligner à quel point c'était difficile.
niveau de stress maximal pour moi, je me sentais une mère nulle, une maitresse de maison nulle (bicoz quelques remarques de sa part tombaient de temps en temps), au point de ne plus me sentir chez moi / fuir mon chez moi, d'autant que j'étais tout le temps en train d'essayer d'éviter aux deux protagonistes de se confronter l'un à l'autre
situation bien évidemment très difficile à vivre par F., sur le dos duquel nous étions constamment. Les tensions dues à nos efforts pour empêcher ses comportements agressifs envers G3 pourrissaient notre relation entière.
J'ai mis, beaucoup, beaucoup de temps à revoir ma manière de considérer les choses. Il m'a vraiment fallu une série de petites choses concomitantes pour commencer à me dire que, peut-être, la situation n'était pas tout à fait telle que je la percevais.
Bref, que je me trouvais face à une situation où il existait une différence non négligeable entre le discours (et même, je pense, ce que G3 elle-même pensait penser), et le comportement
différence entre la
simplicité affichée ("
je ne suis pas compliquée, tout me va") concernant les repas, et les réactions face à ce qui atterrissait sur la table, et notamment une réticence très claire à manger ce qui venait de
TooGoodToGo. (du coup, je n'osais plus trop toogoodtogoter !)
différence entre la serviabilité des premiers jours (elle avait repassé les chemises de Monsieur !) et les remarques insistantes du style "la poubelle est pleine"... sans jamais la vider.
différence entre la volonté de communiquer simplement et la manière dont cela avait finalement lieu.
Ainsi elle qui au départ s'était proposée pour cuisiner le dîner les soirs des jours où je bossais (ah, quel bonheur de rentrer pour trouver tout cela tout prêt !), et ce d'une manière qui m'avait donné l'impression que c'était plutôt quelque chose qui lui plaisait…
visiblement ce n'était pas le cas. En effet, un beau soir où c'est Monsieur Bout qui rentrait avant moi et où je lui avais annoncé "le repas sera prêt", il est arrivé dans une cuisine vide, avec une G3 assise dans le salon lui disant "en fait, je trouve ça trop de faire à manger 2 fois par semaine, je ne l'ai pas fait". Se retrouver mis ainsi devant le fait accompli, à 19h passées… nous avons apprécié.
Différence entre l'intérêt affiché pour les enfants et la disposition à les gérer réellement : quand il s'agissait de contribuer à leur hygiène (ne serait-ce que doucher une E. après qu'elle se soit fait pipi dessus durant une journée de garde), aider à s'habiller ou donner la becquée à une petite ne mangeant rien car fatiguée… Je pense qu'elle avait vraiment sous-estimé cela / surestimé son envie / sa capacité à s'adapter aux besoins de petits enfants. Et que ce décalage, auquel j'ai longtemps été aveugle, mon F. très sensible l'a, lui, très vite perçu.
Différence entre les positions éducatives discutées et les réactions réelles face à des comportements inadaptés : inaction / absence d'intervention sur le coup d'un côté, criminalisation après coup ("ouh, aujourd'hui E. a dit un gros mot à la ludothèque, ça part mal !") de l'autre.
Une différence dont je n'ai probablement perçu qu'une partie, mais qui m'a été confirmée après coup par le personnel de la ludothèque et ce qu'on a pu m'y raconter.
Une chose dont je me dis maintenant qu'elle aurait du me mettre la puce à l'oreille est que les choses étaient devenues compliquées dès la toute première fois où G3 s'en était occupée seule, le temps d'une balade.
Pendant longtemps, j'ai exclu l'hypothèse que ce soit une réaction inadaptée de sa part qui ait pu inciter F. à la classer dans la case "ennemi à abattre". Maintenant, je n'en suis plus si sûre.
…
Très honnêtement, je pourrais continuer comme ça longtemps mais
1. Je ne suis pas ici pour faire son procès
2. Ca tombe bien, car je suis toujours perplexe quant à ce qui s'est réellement passé
Dans tous les cas, il ne s'agissait pas de mauvaises intentions de sa part mais, je suppose, d'une combinaison explosive entre une erreur d'appréciation, par elle-même, de ce que serait une vie chez d'autres personnes avec de jeunes enfants, et le comportement de F.
Une chose est sûre : dès le départ, la situation s'est retrouvée viciée, déséquilibrée, entre une Gwen (+ Monsieur) en situation de coupable(s) essayant de lui épargner des choses inacceptables, et une G3 parée de toutes les qualités, sur fond d'épée de Damoclès de son départ planant au dessus de nos têtes.
Mais comme j'étais partie du principe que nous avions la même vision des choses... j'ai adopté la sienne : je me suis retrouvée à regarder mon fils avec ses yeux à elle, pendant de longues semaines, et ça aussi ça a été très stressant.
A l'arrivée, quand j'ai remis les choses en perspective, je me suis arrangée pour pouvoir gérer les dernières semaines avant le retour du Jedi de G1, et nous nous sommes mis d'accord sur une date de départ anticipée.
Autant vous dire qu'à ce stade, je n'étais plus très confiante sur l'avenir du système "mamie-au-pair" au sein de la famille Bout.
Pourtant, là, nous sommes début décembre et ça y est, nous avons trouvé quelqu'un qui prendra la suite de notre G1 quand celle ci repartira chez elle au milieu du printemps.
Suis-je folle ? C'est possible.
Disons qu'ayant encore tiré un certain nombre de leçons de nos malheurs, je suis disposée à voir, une dernière fois, si la prise en compte de ces points-là peut permettre une meilleure expérience.
(masochisme ? Peut-être.)
Et du coup, je vous partage le fruit de mes réflexions, ça pourra toujours vous être utile si l'aventure vous tente.
Leçon numéro 1. Tout est question de motivation(s)
C'est au fond la même chose qu'avec une jeune fille au pair. La question épineuse est : quelle est la part de l'intérêt pour le contact avec les enfants dans le choix d'un départ "au pair" ?
Le risque est que ce départ soit avant tout motivé par un intérêt externe (notre G3 était boulimique de culture; sur ces jours off, elle a englouti un nombre de musées impressionnant). On se dit "ah, et puis les enfants, je sais faire, c'est mignon, ça passera tout seul" : la contrepartie ne doit pas être trop fatigante.
Là, nos enfants se sont retrouvés à gêner G3, d'une manière qu'elle n'avait pas du tout anticipée
- ainsi les repas pris en commun étaient d'autant plus tendus que nous, parents étions partagés entre le souci de répondre au besoin de notre G3 d'avoir une conversation d'adulte, et celui de répondre au besoin d'attention des enfants.
- De la même manière, la semaine où E. a fait des cauchemars 3 jours d'affilée, G3 a clairement trouvé très horripilant de voir ses nuits entrecoupées par des pleurs (même si, bien entendu, hein, c'était moi qui me levais). Y compris allusion au fait que ce serait mieux si sa chambre n'était pas au même étage que celles des enfants (ce qui laisserait… la nôtre, vous l'avez deviné)
- Quant aux journées que G3 passait avec E., elle les trouvait très longues, et ne manquait pas de le souligner à chaque fois. Si bien que je me sentais coupable à chaque fois que je lui annonçais le planning de la semaine qui débutait…
Donc oui, c'est un point à bien avoir en tête : évidemment qu'une au-pair ne vient pas QUE pour garder nos enfants, mais son degré d'intérêt pour passer du temps et réellement rentrer en relation avec les enfants, y compris dans leur dimension moins sympa / moins glamour (soins corporels, colères, etc), peut être très variable et jouera une part essentielle dans la réussite de son séjour.
Leçon numéro 2. Compatibilité avec les enfants : l'importance du vécu personnel
Je réalise que, selon les modèles d'enfant qu'on a à la maison, il peut être crucial de sélectionner un au-pair ayant été confronté à des modèles analogues.
Il n'y aurait eu que E. à garder, la période avec G3 aurait probablement été tout à fait correcte, et même G2 aurait pu réussir à sortir son épingle du jeu (c'est nous qui aurions succombé à son
bavardage incessant, je pense).
Bref, dorénavant, je suis déterminée à sélectionner des mamans d'enfants ayant été "un peu compliqués". Car au fond, soyons honnêtes (pour une fois) : oui, si je n'avais eu qu'E. comme fille, je serais peut-être décontenancée par le comportement de F. (remarquez, en tant que mère de F. , je le suis déjà, décontenancée), et je pourrais en être choquée, adopter un regard désapprobateur et jugeant ("c'est sûrement dû à …"). C'est ce qui s'est passé avec G3.
Alors que
Du coup, le fait que notre future G4 (celle qui viendra en fin de printemps prochain) en ait ch** avec sa numéro 2, adoptive, constitue également un aspect qui me rassure, une sorte de garantie… En avoir discuté avec elle et qu'elle m'ait dit "non, on le voit bien, parfois l'amour ne suffit pas, on a beau faire tout ce qu'on peut, on n'arrive pas toujours à aider son enfant", m'a fait beaucoup de bien.
Leçon numéro 3. Les limites d'une sélection à distance
Une chose est sûre : c'en est fini de la sélection au téléphone / par Skype. Dorénavant (si notre prochaine expérience s'avère concluante et permet de valider la procédure ;-) ), téléphone et Skype ne seront plus qu'un moyen de présélection. Nous ne prendrons une décision qu'après avoir rencontré la personne en chair et en os, l 'avoir accueillie à la maison sur minimum un weekend.
C'est ce qu'a proposé notre future G4, et donc ce qui m'a convaincue de retenter une dernière fois l'expérience. Et encore : au départ, quand elle est donc venue nous rendre visite sur un weekend en novembre, je l'accueillais en mode "rien à perdre", mais avec de sérieux doutes sur le résultat final (j'étais vraiment, vraiment, proche de clôturer définitivement le chapitre "mamie au pair").
Double avantage à un tel weekend de prise de contact
- 1. Cela permet de ne pas être dans la représentation / le souci que notre famille lui plaise et qu'elle veuille rester,
mais dans la présentation honnête de ce qui l'attend. De vivre les premiers moments non dans l'appréhension d'une crise des enfants et la crainte d'un jugement, mais avec l'aisance d'une attitude à "C'est ainsi, à toi de voir ; si cela ne correspond pas à tes attentes, c'est entendable" : au point que, durant ce weekend de novembre, G4 et moi espérions toutes les deux une colère de F. pour qu'elle puisse en prendre la mesure. Hélas, non. Nous avons échangé un regard complice à un moment qui semblait offrir une possibilité de départ en vrille, mais je l'ai bêtement géré en mode Faber&Mazlish et du coup le conflit a été tué dans l'œuf. Caramba.
Il n'empêche qu'une rencontre sur ces bases-là détend bien ! Et même si il reste toujours intéressant de parler éducation avant de se rencontrer (histoire déjà de ne pas se rencontrer pour rien), une telle discussion reste trop théorique et ne remplace pas l'observation in situ.
- 2. Une rencontre préalable facilite aussi, je pense, l'acceptation par les enfants.
En effet, une telle rencontre permet un premier contact Granny / enfants sans qu'il soit biaisé par "et elle va s'occuper de vous". L'avenir nous dira si le fait d'avoir procédé ainsi porte réellement du fruit, mais il est même prévu une 2ème visite de la part de notre future G4 vers la fin de l'hiver.
C'est à ce moment que nous dirons aux enfants qu'il est prévu qu'elle revienne plus longuement. Une annonce qui sera plus naturelle : "G4, que nous connaissons (qu'ils auront vue déjà 2 fois, du coup), reviendra vivre un peu plus longtemps à la maison et aider maman".
Beaucoup moins brutal que l'importation soudaine d'une parfaite inconnue. A noter : cette suggestion est venue de ladite G4, ce que j'estime être un signal supplémentaire encourageant concernant sa finesse psychologique.
Ca, c'est la chance d'habiter en région parisienne et de viser uniquement des germanophones : il est tout à fait envisageable de venir nous voir sur un weekend sans que cela n'engendre des frais inacceptables. Cela peut être bien plus difficile pour une famille expatriée à l'autre bout du monde. (sauf à profiter, peut-être, d'un passage un peu prolongé en Europe à l'occasion de congés d'été par exemple, pour organiser cette rencontre ?)
3. (oui, dans double avantage, il y a 3) Cette rencontre permet d'aborder en face à face toute une série de sujets "annexes" mais qui peuvent fortement peser sur l'agrément de la vie en commun. Et les aborder face à face permet de beaucoup mieux jauger les réactions / degré d'enthousiasme de son interlocuteur !
Alors, justement
Leçon numéro 4. Ces points "annexes" à vérifier / discuter / établir avant de se lancer
L'avantage d'avoir déjà 3 expériences derrière nous, c'est que nous avons eu l'opportunité de repérer pas mal de choses qui jouent un rôle dans le succès de l'aventure au pair. En effet, honnêtement, G3 et moi nous serions très bien entendues pour quelques jours, et d'ailleurs nous nous sommes très bien entendues pendant plusieurs jours, et même après, nos relations sont restées cordiales sur un certain nombre de points. Mais il y a une énorme différence entre bien s'entendre le temps d'un café ou de quelques jours, et passer de longues semaines à vivre ensemble.
Parce que certaines des choses qui font cette différence s'étaient naturellement mises en place avec notre G1 (et nous les retrouvons avec joie depuis une semaine !), nous les avions tenues pour acquises, et il nous a fallu notre vécu avec G2 et G3 pour réaliser que non, ce n'était pas une évidence pour tout le monde.
Moralité, j'ai profité de notre weekend avec G4 pour aborder chacun des points suivants
Et j'ai eu, du reste, la chance de pouvoir observer ses réactions la fois où mes charmants enfants lui ont lancé quelques petites phrases pas sympa : voir G4 prendre cela sur le ton de l'humour, et marquer ses limites de manière assez détachée (par opposition à une G3 le prenant très personnellement), m'a permis de vérifier la capacité à garder en tête que les enfants… sont des enfants.
Vraiment, la capacité à ne pas prendre les choses personnellement … c'est quelque chose. (je me le suis encore dit cette semaine où, après une très longue journée à être gardés par G1 du lever jusqu'au coucher, et très bien passée, paf, les enfants se sont transformés en horribles Gremlins à 5 minutes du coucher. Nous sommes rentrés dix minutes plus tard et avons trouvé G1 assise dans le salon, pendant que la guerre avait lieu à l'étage : ayant constaté que toute action visant à rétablir le calme ne portait aucun fruit, elle avait choisi de se retirer de la situation plutôt que de foncer dans le rapport de forces. Probablement la meilleure solution, qui a évité, à elle, beaucoup de frustration, et qui nous a permis, à nous, de prendre sereinement le relais)
G1 s'abstenait de trop parler pendant le dîner, et nous profitions généralement du temps suivant le coucher des enfants pour discuter tranquillement, c'est là qu'elle nous racontait sa journée. Très clairement, j'avais sous-estimé la non-négociabilité de ce point.
En semaine, les enfants ne voient leur père qu'au moment du dîner, quasiment, et les jours où je travaille, c'est la même chose pour moi. Pour éviter qu'ils ne se sentent en rivalité avec la mamie au pair pour notre attention, voire qu'ils ne recourent à des moyens … pas top… pour se l'assurer, il est important que les conversations du repas les incluent, voire leur soient destinées en priorité, et non n'aient lieu au dessus de leurs têtes.
Au lieu d'espérer que notre granny le comprenne toute seule (ce qui avait misérablement échoué tant avec G2 qu'avec G3), j'ai clairement exprimé mes attentes à ce sujet vis-à-vis de G4 : nous serons ravis de partager de chouettes discussions avec elle, mais plutôt en dehors de la présence des enfants. L'avantage étant que, pour le coup, je peux justifier cela avec notre expérience de famille au pair aguerrie : oui, c'est un point important pour que la greffe prenne, point.
Les jours où nous recevions du monde à dîner par exemple, G1 venait souvent causer à l'apéritif, puis se faisait quelque chose dans la cuisine, ou prévoyait tout bonnement une sortie. Elle a partagé quelques repas avec nous, mais plutôt quand les "invités" étaient tout bonnement ma sœur et mon beau-frère, que nous voyons souvent.
Alors que G2 et G3 restaient systématiquement, de l'apéritif à la tisane, y compris quand il s'agissait d'amis pas vus depuis longtemps. Assez agaçant, car bien évidemment la discussion n'est alors pas la même… Là encore, du coup, j'ai exprimé nos attentes, en soulignant à la fois notre souci de l'intégrer (et donc que nous serons ravis de l'avoir avec nous pour certaines visites de ma famille, et qu'elle sera par exemple toujours bienvenue pour l'apéritif par exemple), et notre besoin d'intimité.
Venant de l'étranger, nos grannies n'investissent pas dans un portable français.
Mais G1 utilisait naturellement What's App et c'est par ce biais qu'elle me prévenait de l'heure à laquelle elle rentrait, de si elle dînerait avec nous ou pas, ou m'envoyait des nouvelles des enfants ou une photo, de temps à autre (je n'ai pas non plus besoin d'être tenue au courant en permanence).
Ce n'était pas le cas de notre G3, par exemple, et j'ai trouvé assez pesant de ne jamais savoir où elle était (ou plutôt, si elle serait à la maison à mon retour de balade par exemple) ni de n'avoir vraiment de possibilité facile pour lui envoyer un renseignement complémentaire (les chaussettes d'E. sont à tel endroit) ou lui poser une question.
Ca fluidifie vraiment les choses / simplifie la cohabitation !
La capacité à s'occuper était quelque chose dont j'avais perçu l'importance dès le départ : trop peur d'avoir en permanence quelqu'un sur mon canapé ! C'était un des points que j'ai toujours abordés avec chacune de nos Granny. Par ailleurs, je les ai toujours mises en relation avec l'une de mes supers voisines dans la même tranche d'âge, pour des excursions communes.
Mais à l'usage, je pense que ce n'est pas suffisant : je crois qu'une partie de la frustration de notre G3, et de son besoin de beaucoup d'interactions avec nous au moment des repas, venait de son isolement : elle engloutissait beaucoup de musées, mais seule la plupart du temps. Alors que notre G1, plus "connectée", profite de Facebook et d'applications dédiées pour rencontrer du monde pour des excursions, visites, cafés linguistiques.
Par ailleurs, l'intérêt porté aux enfants influe aussi sur cette variable. Ainsi, G1 interagissant beaucoup avec eux quand elle les garde, elle est contente de se retirer au calme ensuite : son besoin d'interaction est largement comblé. Ce n'était pas le cas de G3 qui, elle, au cours d'une journée de garde avait plutôt fait des stocks d'ennui, et attendait avec impatience le moment de retrouver des adultes.
Bref, la capacité à s'auto-alimenter en contacts humains est probablement quelque chose à prendre en compte / un point à aborder avec les potentielles grannies au pair.
Difficile à vérifier au téléphone, très clairement;... et pourtant, essentiel.
G3 était quelqu'un d'un abord agréable, elle pouvait faire preuve d'humour, mais… elle n'était au fond pas très spontanée et ses efforts de rigolade avec les enfants n'étaient pas très naturels, ce que ceux-ci ont probablement ressenti.
D'où l'intérêt d'une rencontre permettant de voir tout de suite sur quel mode la granny interagit avec nous comme avec les enfants. Ainsi, une manière pour F. d'entrer / rétablir le contact est en ce moment de jouer à "attraper" (j'aimerais bien vous pondre un rapide billet sur le sujet, du reste), et G4 est instantanément rentrée dans le jeu, de la même manière que 24 ou 48h après son arrivée, notre G1 se roulait déjà sur le tapis avec les enfants, dans de grosses parties de chatouilles.
Cela dépend des familles, peut-être, mais en tous cas une chose est sûre : pour la nôtre ce n'est finalement pas un "plus sympa", "nice to have", mais quelque chose d'indispensable à ce que la mayonnaise prenne. Si l'adulte se prend trop au sérieux pour rentrer véritablement dans ce genre de jeux, l'intégration est compromise.
De la même manière, cette spontanéité s'est aussi retrouvée dans le fait qu'au bout de quelques heures, G4 et moi nous "chambrions" déjà gentiment. Une aisance de bon augure pour notre future cohabitation.
J'avais perçu très vite l'intérêt d'être un minimum sur la même longueur d'ondes côté alimentation, et nos expériences me l'ont confirmé, et ont surtout renforcé l'importance de ce point.
Par exemple, à l'usage il s'est avéré assez agaçant pour moi de voir G2 et G3 froncer le nez sur ce que je servais (l'estomac de 70 ans de G2 ayant du mal à digérer les crudités qui font une partie de notre régime alimentaire en été, par exemple; et G3 n'appréciait pas toujours mon style de cuisine / les aliments proposés : trop riche, trop ou pas assez chose).
Je suis gourmande, j'aime cuisiner, et en fait : quand on est amené à partager de nombreux repas, la compatibilité des goûts alimentaires est à vérifier de manière plus précise. Je percevais qu'une végétarienne serait malheureuse chez nous, mais l'expérience m'a montré qu'à la longue des tensions peuvent apparaître même sans de telles différences de régimes. Quand on fait un bon gâteau et que son hôte n'en prend qu'un quart de part bicoz ce ne serait pas raisonnable, c'est beaucoup moins drôle de s'empiffrer ! Alors que voir une G1 ou une G4 dire qu'elles n'ont plus faim, puis se laisser tenter par une ou 2 portions de rab supplémentaires, c'est bien plus sympa.
A la table de gourmands comme nous, il faut d'autres gourmands !
Moralité : oui, un accueil au pair c'est plein de potentiel.
Un fabuleux potentiel positif (soutien - j'aime bien, aussi, toutes ces chouettes conversations !, souplesse logistique, économie financière, support linguistique), mais aussi, avouons-le, un potentiel à emm*** non négligeable.
Si l'aventure vous tente, j'espère que mon expérience vous en permettra de meilleures (d'expériences).
Et bien entendu, je ne manquerai pas de vous raconter la suite de nos aventures sur ce plan-là.