Avoir des enfants c'est chouette.
S'en occuper, aussi.
Mais ces deux années ont été très différentes, à bien des égards, et notamment sur la manière dont faire garder mes enfants m'a aidée (ou pas) à conserver un semblant d'équilibre personnel (pour ne pas dire : mental).
Comme c'est une problématique d'utilité publique, je viens vous partager le fruit de mes observations sur le sujet : en effet, j'ai fait l'expérience d'à quel point l'efficacité de ces créneaux de garde sur le rechargement des batteries maternelles peut être variable.
Plus on passe de temps avec ses enfants, plus on a intérêt à s'organiser pour que les moments sans eux soient efficaces.
Voici donc 7 points à prendre en compte pour "faire garder ses enfants utile", c'est-à-dire, que le ressourcement soit bien au RDV.
1. Durée des créneaux
On fait évidemment avec les possibilités que l'on a, mais autant que possible, il est bon de veiller à ce qu'un de nos créneaux réguliers au moins soit "assez long" : n'oublions pas qu'en tant que maman, on met toujours un peu de temps à se déconnecter (au moins partiellement) de nos responsabilités de maman. Peu importe la manière dont on a prévu de passer le créneau, si on le fait dès le départ avec une horloge en tête / la perspective de retrouver nos mômes, ou si on est déjà en train de planifier ce qu'on va faire quand on les retrouvera, l'effet coupure en prend un sacré coup.
Quelle durée minimale ?
Cela fluctue évidemment en fonction des contraintes (si on doit systématiquement prévoir 1/2h de route pour le moindre truc par exemple. Ou si à l'inverse on a un bébé allaité à gérer), mais en ce qui me concerne, j'ai vu qu'il me fallait au minimum 1 créneau / semaine d'au moins 4-5h. Si j'en ai 6, c'est encore mieux.
Bien entendu, c'est personnel, ça dépend des possibilités, mais c'est un point à avoir en tête / une variable à ajuster si on remarque que quelque chose cloche !
2. Stabilité et prévisibilité des créneaux
Oh punaise, là, typiquement, ça a été la différence énorme entre année IEF 1 et année IEF 2 chez nous :
- L'an dernier, j'avais un seul mode de garde (hormis les petits babysittings du soir): une personne, fournie par O2, avec des créneaux très fiables, réguliers dans le temps (mardi, jeudi).
- Cette année j'ai jonglé entre différentes personnes, des personnes extérieures, des personnes au pair arrivant, repartant (certaines plus vite que prévu), des dépannages d'amis / famille, j'ai alterné des moments où j'avais plusieurs personnes à dispo, d'autres ou je n'avais persoooooooonne, bref, je n'ai pas eu de routine de garde. Une semaine c'était tels jours à tels horaires, celle d'après c'était différent, la suivante encore.
Dur dur !
- beaucoup plus difficile de planifier son temps, et donc d'en profiter :
- à Strasbourg, je pouvais prévoir mes créneaux des semaines à l'avance, prendre des RDV en étant sûre d'être disponible (ou à l'inverse, prévoir une sortie avec les enfants sans me demander si, en fait ça n'allait pas tomber sur ZE jour où j'aurais pu les faire garder), et si j'avais envie de voir une copine overbookée je savais ce que je pouvais lui proposer, et nous finissions toujours par trouver une possibilité, avec 6 semaines de délais au besoin.
- Cette année... ben vous reprenez ma phrase précédente et vous rajoutez des "ne pas". Du coup il m'a été bien plus difficile de faire les choses auxquelles je tenais
- charge mentale x10 puisque j'ai passé mon temps à envoyer des sms tous azimuts pour prévoir la semaine suivante; d'autant que, rappelons-le, la routine, c'est reposant...
- stress constant : allais-je réussir à me trouver le temps nécessaire pour ce que j'avais à faire / pour moi ? Du coup, l'effet "je suis bien avec mes enfants car je sais que j'aurai des moments pour être bien sans eux" était beaucoup moins présent, une épée de Damoclès pesant en permanence sur ces moments "bien sans eux".
Bref, le critère de la stabilité est trèèès important dans le choix du mode de garde; et typiquement, si c'est votre maman qui doit faire partie de la solution, mais qu'elle craint d'avoir trop de contraintes, il vaut mieux insister pour un créneau régulier, même moins fréquent (une matinée tous les 15 jours ), que pour du "on voit spontanément", même potentiellement plus fréquent. Ou alors, compter sur quelqu'un d'autre pour assurer le minimum stable.
3. Une vraie séparation physique, notamment auditive
Celle-ci est automatiquement présente si on fait garder son enfant à l'extérieur : crèche, garderie, centre aéré, assistante maternelle, chez une copine ou un membre de la famille.
En revanche, c'est plus compliqué si on a recours à une babysitter / nounou à domicile.
En ce qui me concerne,
je m'étais réjouie de ce que notre nouvelle maison, avec ses 3 niveaux, allait me le permettre facilement. J'ai vite changé d'avis : non,
être tout en haut de sa maison, en train de se reposer / bosser / peu importe, mais avec les enfants "quelque part" tout près, ce n'est pas un bon plan pour déconnecter.
Il ne s'agit même pas du fait qu'ils pourraient venir nous déranger / solliciter. Les miens ne le faisaient pas. Mais rien que les entendre, entendre leurs protestations, la manière dont la babysitter gère ou ne gère pas, etc : l'effet déconnexion est complètement perdu.
Une seule solution (enfin, en fait, 2. Mais la seconde fera l'objet du point suivant, donc 1. un peu de patience 2. un peu d'égards pour la structure de ce billet, merci)
Donc une seule solution-même-si-en-fait-deux : émigrer.
- Aller se poser à la bibliothèque, dans un Starbucks ou un salon de thé sympa,
- se faire inviter par une copine...
Notre déménagement m'a, à ce niveau, ouvert des possibilités absolument extra.
Non seulement j'ai la possibilité, avec le réseau commercial que j'ai rejoint pour la partie RH, de me rendre dans leurs locaux, en mode co-working, mais surtout, notre résidence s'est révélé être un espace riche en possibilités !
Je vais régulièrement
passer la journée chez une de mes voisines : nous nous installons sur sa table de salle à manger, l'une en face de l'autre, elle gère ses trucs, moi les miens. Nos moments "studieux" sont régulièrement interrompus par des pauses papote, notamment au moment du déjeuner. Et celui-ci est soit concocté par elle (miammmm), soit j'y contribue en arrivant avec, sous mon bras, un tupperware (
en verre, hein) de langue de bœuf faite-maison tout droit sorti de mon congélateur.
- Temps de trajet : 30 secondes.
- Difficulté à me garer : énooorme !
- Cumul vie sociale et temps au calme pour avancer sur mes sujets : +1000.
Je faisais la même chose avec une autre de mes voisines pendant son congé maternité un peu prolongé. Depuis qu'elle a repris, j'ai les clés de sa maison, et l'autorisation de venir m'y réfugier quand je veux, mon PC et mon pique-nique sous le bras. Comme je le lui écrivais dans un SMS récemment : "j'ai fait 50m, je suis chez toi, y a pas mes enfants, c'est calme, c'est le bonheur".
Réciproquement, j'ai volontiers accordé asile à une copine-voisine ayant commencé à s'offrir quelques créneaux de garde sur ses fins de journée, mais ne sachant comment se reposer quand ses enfants étaient juste de l'autre côté de la porte de sa chambre (voire, y tambourinaient).
Consciente de l'importance de cette séparation physique, je l'ai mise à l'aise : elle pouvait venir chez moi, et choisir entre causer avec moi, ou filer tout en haut s'isoler dans ma chambre et lire, passer des coups de fil, faire une sieste, n'importe ! (sans que je m'offusque ni ne dise du mal d'elle sur le blog, évidemment. C'est pour cela que j'écris si peu sur le blog en ce moment, en fait : j'ai plein de choses à dire mais comme c'est du mal au sujet de gens sur lesquels j'ai promis de ne pas médire, je me retrouve à court d'inspiration. Si si. J'vous jure. C'est l'explication)
4. La possibilité d'être tranquille, chez soi !
Eh oui, quand même, ça aussi, c'est un souci qu'on a quand on fait garder ses enfants à domicile : pouvoir passer du temps tranquille, seule, et chez soi. Car les solutions citées au point 3 impliquent toutes de laisser le terrain aux fauves, et ce n'est pas toujours propice à la détente :
- Pour des raisons financières, d'abord : c'était ce qui me manquait l'an dernier, c'était chouette de retrouver des copines au resto, mais bon, pas très économique à la longue
- pour des raisons logistiques, ensuite : y a des moments, on aimerait bien ne pas avoir ses gosses dans les pattes pour RANGER. (par exemple) Ranger TRANQUILLE!
- pour des raisons de détente, enfin : être seule chez soi; pouvoir, même, s'allonger sur son lit; faire une sieste, peut-être ?
- Accessoirement, on pourrait aussi avoir envie d'inviter une copine à boire un café ou déjeuner, au lieu d'être l'éternelle squatteuse.
Donc, dans le choix du mode de garde, des horaires, et dans les réflexions logistiques, il est bon d'inclure la possibilité, au moins de temps à autre, d'expédier tout ce joli monde DEHORS, pour se retrouver seul maître chez soi.
Au moins sur une partie du créneau :
- grande balade au parc ou dans les rues de la ville,
- à Strasbourg il y avait eu des journées au Vaisseau, il m'était même arrivé d'aller y déposer nounou et enfants le matin, pour aller les y chercher en fin de journée, quand le trajet s'annonçait trop compliqué pour leur permettre de le gérer de manière autonome.
- ici ma grande amie est notre ludothèque chérie : à condition d'avoir une babysitter assez mature pour gérer le quart d'heure de trajet à pied dans les rues, hop, c'est plusieurs heures de calme chez moi.
Inclure la possibilité donc... et l'utiliser !
5. Le bon mix entre l'utile et l'agréable
Faire garder ses enfants, c'est très précieux, à la fois pour
- se déstresser en faisant des choses sympa, qui nous détendent, des trucs qu'on aime
- se déstresser en faisant des choses utiles, que le fait de pouvoir cocher sur notre to-do list contribue à notre détente / le maintien de notre stressomètre à un niveau acceptable, mais qui sont nettement plus compliquées à accomplir avec des enfants dans les pattes : administratifs, RDV relous, ménage, rangement,...
Bref, faire garder ses enfants utile, cela suppose de réussir à mixer les choses qui nous font nous sentir bien "pour nous", et les choses qui nous font nous sentir bien "dans notre vie", en nous aidant à avoir le sentiment de la maîtriser.
Quel est le mix idéal ? Haha, ne comptez pas sur moi pour vous donner la recette, hein : évidemment, il n'y en a pas, ça dépend, du vent, de l'âge du capitaine, de la personne en question, du moment, bref.
Mais c'est juste à avoir en tête, histoire, de temps en temps, d'opérer un petit recentrage :
- "laisse béton le ménage, poulette, et offre toi une heure en tête à tête avec un roman" (et, par extension, communiquer cela au conjoint parce que si avoir agi ainsi expose à un "ben dis donc c'est crade ici" au retour du héros le soir, bonjour le moral. Une petite remise au point sur le pourquoi de ces heures de garde s'impose alors)
- ou à l'inverse "bon, quel est le truc sur ta to-do list qui te stresse sournoisement depuis longtemps, et que tu vas pulvériser lors de ton prochain créneau de libre"
6. Le refilage éhonté des moments relous
Dans la vie de parent, il y a des moments potentiellement plus conflictuels, donc plus usants que d'autre. Citons (liste non exhaustive...)
- les couchers : coucheeeez-vous, reeeeestez couchés et ennnnndormez-vous bon sang
- les repas : restez assis, parlez moins fort, non pas par terre l'assiette, il te reste du yaourt,oui y a que ça à manger, la glace ce sera au goûter, non postillonner la bouche pleine de purée n'est pas une bonne idée, étaler la purée dans les cheveux du frère non pluuuus,
- les bains,
- les sorties au parc...
Chaque parent a ses moments "préférés".
De mon expérience, il est particulièrement bénéfique à tout le monde de s'arranger pour que, dans le lot des heures où l'on confie son enfant à quelqu'un d'autre, figure l'un ou l'autre des moments un peu plus usants à gérer. Il est beaucoup, beaucoup plus facile de rester patient face à un repas un peu compliqué, quand on n'a pas la charge de 100% des repas. Beaucoup beaucoup plus facile de rester zen face à un coucher compliqué, quand ce n'est pas le centième coucher compliqué qu'on assume d'affilée.
Pour la personne à qui on confie l'enfant, bon, eh bien, au pire, ça fait un moment un peu relou. Et encore :
- n'oublions pas qu'il y a bien des chances que ça se passe différemment avec cette personne, puisque nos enfants ont une sacrée tendance à nous réserver la majorité de leurs comportements agaçants (merci la figure d'attachement).
- Dans tous les cas, faisons-le sans scrupule : un diner un peu énervant, ça n'a pas du tout le même impact que la répétition des mêmes dîners un peu énervants chaque jour de la semaine. La babysitter / nounou, etc, elle, quand elle rentre chez elle, elle laisse nos enfants derrière elle. Sa journée avec eux est finie. La nôtre : jamais.
C'est ce que je disais récemment à une copine voisine dont nous avons gardé les enfants pour une soirée. Elle craignait de m'infliger le coucher compliqué de son Pas-encore-un-an : moui, ben, au pire, ça allait nous faire une soirée un peu égayée par un bébé en pleine forme nettoyant notre parquet en rampant dessus dans son Babygros.
Ça n'allait pas nous faire grand mal, et surtout le désagrément éventuellement causé n'aurait rien à voir avec l'agrément d'une soirée, pour les parents-heureux-mais-un-peu-fatigués-quand-même, SANS ce même bébé Duracell.
Accessoirement, Bébé Duracell s'est finalement endormi à 20h45 au bout d'un accompagnement au sommeil de maxi 10 minutes.
Y a pas de justice je vous dis.
Donc voilà, il peut être bon de faire commencer le créneau de l'après-midi par le déjeuner, ou terminer celui du matin par un déjeuner. Ou faire un créneau 10h30-14h30 qui permet d'arriver à une heure où les enfants sont déjà à la sieste. N'importe quoi, pourvu qu'on puisse effectivement compter, dans sa semaine, sur quelqu'un d'autre pour nous décharger d'au moins un épisode un peu délicat. Ce n'est pas de la lâcheté, c'est de l'auto-conservation.
Pour ceux qui ont des enfants plus grands et scolarisés, bien entendu, le refilage du créneau devoirs figure aussi parmi les priorités à envisager : imaginez, une fois par semaine, que ce soit quelqu'un d'autre qui s'y colle. Ça fait rêver, hein ? Just do it.
7. La confiance dans le fait que ça se passe bien, et le lâcher-prise sur le fait que ce sera le cas
Eh oui. Pas toujours facile de trouver quelqu'un envers qui on aura assez confiance pour lui confier ses enfants pendant plusieurs heures, et pouvoir le faire le cœur tranquille.
J'en ai récemment fait l'expérience avec mes déboires mamie-au-pairesques : confier ses enfants quand on se demande avec angoisse commeeeeeent ça va se passer, c'est pas super détendant.
A l'inverse, ma petite sœur vient de repartir après être venue me dépanner pendant 15 jours, et voir à quel point elle prenait soin des enfants, et veillait à rester en ligne avec notre fonctionnement éducatif, m'a permis de passer des temps "sans enfants" particulièrement efficaces à tous points de vue.
Il s'agit donc d'investir du temps dans la sélection, et d'oser être un peu difficile (je lisais récemment le témoignage d'une fille dont la belle-sœur insistait pour garder les enfants, mais prévenait bien qu'elle n'en ferait qu'à sa tête avec eux, c'est-à-dire en complète contradiction avec le mode de fonctionnement de la fille en question. ) : si c'est tellement loin de ce qu'on souhaite pour son enfant qu'on ne pourra pas profiter sereinement des heures de garde, on est légitime pour les refuser / chercher une autre solution !
A ce niveau, faire marcher le bouche-à-oreilles est très précieux : une des babysitters qui m'ont dépannée ces dernières semaines m'a été recommandée par une de mes voisines (oui, je sais, je fais que parler de mes voisines; mais elles sont chouettes, que voulez-vous que j'y fasse ? Pour vous aider à vous y retrouver, je pourrais ptet leur donner des numéros.... mais V1, V2, ça fait un peu missile...). Ladite voisine connaissant bien mes enfants, elle avait pu m'assurer que le courant passerait bien entre cette fille d'amis et mes rejetons, et elle ne s'est pas trompée !
Par ailleurs, oui, un peu de lâcher-prise : certaines choses peuvent ne pas se passer exactement comme on le souhaiterait, mais est-ce si embêtant au regard de ce que ces heures de liberté nous apportent / apportent aussi à nos enfants ?
Il s'agit de peser le pour et le contre, en pensant bien, tout de même, que le contact avec un parent détendu aux batteries pas-trop-vides est un besoin de l'enfant aussi.
Si être adulte, c'est être au bout du rouleau, est-ce que grandir vaut la peine ?