Attention, aujourd'hui, je vais vous raconter comment nous avons pu fabriquer notre petit H.
(c'est le moment où, affolée, vous levez les yeux de votre écran et dites à votre conjoint ou votre meilleure copine "Nan mais ça va plus du tout ce blog, ça part en rubrique sexo de bas étage !!")
Eh non, encore une fois non, foin de détails croustillants aujourd'hui. Désolée. Si vous voulez du croustillant en lisant mon blog... prenez des chips.
Il n'est pas toujours facile d'appeler un chat un chat.
Reconnaître qu'on a été victime d'un traumatisme, hum, pas évident.
Reconnaître qu'on a sans doute besoin de faire appel à un psy, pas évident non plus,.
Et ce, même si le recours à des professionnels de l'aide se normalise énormément ces dernières années, ce qui est une sacrée chance pour notre génération et celles qui suivront !
Normalisation ou pas, hein, franchir le pas d'aller voir un psy n'est jamais facile, et l'un des aspects est qu'on sait quand ça commence, on sait pas trop forcément quand ça finit.
Personnellement, eh bien, tout pareil.
Voici donc un petit témoignage / présentation de derrière les fagots, au sujet d'une approche adaptée :
- efficace
- libératrice
- et BREVE
- pour adultes et enfants.
Contexte :
J'ai évoqué
ici et
là les circonstances de la
naissance de F. back in 2013, naissance provoquée en
catastrophe par la découverte, à 8 mois de grossesse, que je faisais une prééclampsie carabinée à laquelle il était impératif de couper court immédiatement. Césarienne immédiate, naissance de F. en bon état,
éclampsie de la Gwen quelques heures plus tard, réa pour la Gwen donc 3 jours de séparation d'avec F.. Puis les retrouvailles, et cui-cui les petits oiseaux.
L'année qui suivit fut particulière. J'en garde un souvenir nimbé d'une aura d'euphorie.
Euphorie favorisée par le contexte particulier dans laquelle s'inscrivait l'arrivée de F. : la grossesse inattendue de F. nous avait subitement sortis d'un quotidien marqué par l'infertilité et un parcours d'agrément d'adoption.
Ce quotidien, c'était
- voir notre voiture choisie "pour quand on aura un bébé" : vide,
- notre grande maison de 4 chambres : vides aussi,
- me perdre dans un supermarché et me retrouver au rayon puériculture,
- faire la queue derrière quelqu'un achetant des Blédina,
- entrapercevoir un ventre arrondi,
- entendre le babillement d'un bébé,
- recevoir un faire-part de naissance ou lire une annonce de grossesse sur FB
= 100 fois par jour, un micro-truc nous rappelait que nous n'avions pas d'enfants et que nos chances d'en avoir "par nous-mêmes" étaient nulles, et 100 par jour, un micro-truc venait déclencher une douleur pas micro du tout.
La première année de F. a été l'exact inverse : je l'ai passée shootée à la dopamine. 100 fois par jour, un micro-truc
- ouvrir sa porte et voir un lit de bébé avec un bébé dedans ;
- voir son siège auto à l'arrière de notre voiture ;
- voir traîner une chaussette taille 18 ;
- acheter à mon tour des trucs au rayon puériculture ;
- devoir faire des abdos pour récupérer un bide amoché par la césarienne ;...
venait me rappeler ce truc de fous : j'avais UN BEBEEEEEEEE.
Je ne sais pas au juste quand cet effet dopant a commencé à s'estomper.
Je ne saurais dire non plus avec précision quand j'ai commencé, de plus en plus souvent, à pleurer en évoquant les circonstances de la naissance de F. Après la naissance d'E. 2 ans plus tard ?
Toujours est-il que peu à peu, ce traumatisme, resté enfoui sous une béatitude de chaque instant au départ, a commencé à repointer le bout de son nez.
Mais hors de question de m'en occuper, oh ça non. Au bout d'un moment, quand c'est devenu trop encombrant, je me suis juste mise à m'occuper du
versant "F. traumatisé par sa naissance"... ça suffisait, non ?
Visiblement non, au vu de mon incapacité à ne pas fondre en larmes dès que je touchais d'un peu près au souvenir de sa naissance.
Il y avait aussi autre chose : un numéro 3, que nous souhaitions depuis un bon bout de temps, ne s'installait pas. Sans raison valable, cette fois, puisque les causes de notre infertilité initiale avaient été pulvérisées. Les quelques examens faits ne livraient aucune explication du pourquoi mes cycles restaient un peu bizarres, ni du pourquoi, même bizarres, ils refusaient de déboucher sur la moindre grossesse.
Anguille sous roche ? Baleine sous gravillon ?
Je faisais l'autruche. (on est bien, la tête dans le sable, hein ? C'est vraiment confortable le sable)
Jusqu'à ce qu'une amie, sage-femme de son état, et auprès de qui je me lamentais, ne mette les points sur les i :
"Oh mais Gwen tu sais, moi j'ai des patientes qui après ce que tu as vécu pour F., ne réussissent plus jamais à avoir d'enfants derrière, hein. C'est traumatisant quand même une éclampsie.
- Meuh non, j'ai eu E. sans problème après F. (et tac!)
- Oui, mais, le traumatisme était-il sorti, au moment de la grossesse de E. ?"
Gloups.
Et ladite copine, de me parler d'une approche psy spécialisée autour de la gestion des traumatismes. Approche brève.
Du coup, c'est avec cette double carotte que, presque 6 ans après la naissance de F., j'ai décroché mon téléphone afin de prendre RDV chez la psychologue EMDR que je m'étais fait recommander près de chez moi
- pour avoir ce 3ème si espéré. J'avoue m'être demandé si j'y tenais vraiment "hein, dis, hein, en fait c'est pas trop grave si tu l'as jamais ton numéro 3 ?", me suis-je sussuré. Raté.
- avec l'espoir d'un truc rapide et d'un résultat tout aussi rapide.
J'ai été servie.
Téléphone décroché en mars, première évocation de la naissance de F. sans pleurer en mai, grossesse de H. démarrée fin juillet (après grosso modo 2 grosses années d'essais infructueux inexpliqués).
Alors, c'est bien joli, mais c'est quoi l'EMDR ? (non ce n'est pas le Mort de Rire)
Les initiales EMDR signifient Eye Movement Desensitization and Deprocessing c’est-à-dire désensibilisation et retraitement par les mouvements oculaires.
Eh ?
Des mouvements oculaires (oh punaise là j'ai les Inconnus qui remontent "non ils n'ont rien oculé"), qu'est ce que ça vient faire dans une thérapie ??
Ces mouvement oculaires sont à rapprocher de ceux que nous faisons naturellement dans notre sommeil, et qui sont associés au retraitement, par le cerveau, de nos souvenirs. Retraitement auquel notre cerveau procède consciencieusement, chaque nuit. Qui permet d'ailleurs d'éviter de crouler sous les souvenirs inutiles, et de reranger tout à sa place.
Or le propre d'un traumatisme est justement d'échapper à ce retraitement. Au lieu de pouvoir donc être classé, le souvenir traumatique reste à l'état brut, doté de toute sa charge émotionnelle : il est (ultra)sensible. Il génère donc des émotions aussi vives que l'évènement initial, et maintient le cerveau en état d'hyperactivité.
Le principe de l'EMDR est d'aller rechercher le souvenir et l'émotion associée (par la verbalisation), puis d'enfin soumettre ce souvenir au retraitement auquel il a échappé (par le biais de tout un protocole incluant ces fameux mouvements oculaires).
- C'est impressionnant d'efficacité, sur de nombreux soucis (traumatismes, phobies, compulsions;...).
- La première séance vise d'ailleurs à valider que cette approche correspondra bien à notre souci (en ce qui me concerne, ça m'avait fait bizarre d'entendre la psy conclure "Oui, vous êtes bien traumatisée, pas de doute, donc nous allons pouvoir travailler ensemble ainsi".)
- Une excellente amie à moi a pu ainsi retravailler la perte de 2 bébés in utero, une autre un accident de voiture qui la laissait ultra tendue au volant.
- Le souvenir reste, mais la douleur associée devient gérable. On n'a plus besoin de dépenser une énergie psychique de malade à contenir cette émotion dans un coin de son être, et/ou à éviter de toutes nos forces toutes les situations qui la font remonter.
- Je précise que même si je n'ai pas directement testé cet aspect, c'est une approche qui est également valable pour les enfants (y compris très jeunes, m'a-t-on dit), pour peu qu'on vérifie que le praticien en question a effectivement l'habitude de jeunes patients et est donc à même de faire les ajustements nécessaires.
- Le plus souvent, le protocole de traitement ne comporte que 3 ou 4 séances. (En ce qui me concerne, j'ai fait plus, mais parce qu'au milieu j'ai du interrompre l'EMDR en tant que telle car c'est le moment où je frôlais le burn-out; On a donc basculé sur des séances plus standard avant de reprendre quand j'ai eu retrouvé un semblant d'équilibre)
Voici donc un peu de 3615 mylife saupoudré d'informations, bref, un témoignage visant à vous faire découvrir un chemin possible, once again.
Parce que vraiment, on vit tellement mieux quand on peut aller soigner ce qui a besoin de l'être !
(Je soupçonne du reste que l'apaisement de F. constaté à l'été 2019 n'a pas non plus été sans lien avec l'apaisement de sa mère
- Et OUI, oui, je dis ça pour vous inciter encore davantage.
Je sais de première main à quel point parfois la carotte doit être grosse pour nous amener à franchir le pas de porte d'un psychologue pour nous-même, alors je vous fais sciemment miroiter que ce sera la solution miracle à tous vos désespoirs éducatifs.
C'est fourbe.)