Dans mon tout dernier billet, j'avais décrété des mesures fortes (#InTheMoodForPériodeElectorale) : challenge de billets courts afin de maintenir le blog (et donc, vous !) en vie jusqu'à ce que je sois en mesure de vous réasséner des billets fleuves.
Challenge qui donc m'a poussée à me tourner vers la solution de facilité pour commencer : reprendre la série des Petits Bouts de bouquin, qu'elle est vachement chouette la série, parce qu'elle permet de lier un bout de théorie top à un bout de pratique bien parlant, un peu à l'image des 200 moments de Parentalité Positive, hasard.
Merci donc, puisque la nécessité de tenir mes promesses (#PasMoodElectoral, là) m'a ainsi incitée à me replonger en mode express dans des trucs méga cool.
Je commence par un petit Bout qui s'est révélé tellement proche d'un épisode récent chez moi que le jus de cerveau nécessaire pour en parler ne risque pas de m'assécher.
Voici donc la citation du jour, issue d'un de mes préférés : "le Cerveau de votre enfant" de Daniel Siegel & Tina Payne
"écrire et parler d'un évènement traumatisant est [...] fondamental dans le processus de guérison. [...] Pour cette même raison, il est crucial que les enfants, quel que soit leur âge, racontent leurs expériences, afin de comprendre les émotions et les évènements qui traversent leur existence."
que l'on retrouve dans cet extrait.
Le Cerveau de votre enfant, pp 82 83 |
En effet, je suis depuis presque 2 ans maman de 3 enfants, et si H. a été costaud à gérer au démarrage du fait de ses intolérances alimentaires et des soucis de sommeil liés, j'en suis au stade où j'apprécie fortement cette notion de 3è : je mesure à quel point que je suis plus zen et sais davantage où je vais.
Ses crises émotionnelles de petit monsieur de 21 mois ? Aucun effet sur moi :
- je sais à quoi elles sont dues,
- je ne les vois pas comme l'annonce d'un mal terrible,
- j'accueille les sentiments, je soulage la frustration si c'est adapté ("ah, tu voulais d'abord le t shirt puiiiis le pantalon"),
- j'admets qu'elle soit dure à digérer si ce n'est pas le cas ("oui, tu t'amusais dans ton bain, et maintenant c'est dur de sortir, hop" + câlin accueillant les pleurs),
- et je laisse ensuite passer l'orage.
Notons la différence entre cette approche et certains écrits très culpabilisants nous disant que le moindre pleur zigouille des neurones par wagons chez notre bébé / le traumatise.
En coaching j'ai appris une série d'aphorismes assez sympas dont l'un s'applique très bien à ce dont nous parlons aujourd'hui :
"ce qui ne s'exprime pas - s'imprime".
C'est l'émotion douloureuse non traitée, non exprimée, qui constitue le plus grand danger.
Le problème n'est pas l'émotion douloureuse en elle-même, le problème est son traitement. Donc, il ne s'agit pas d'éviter à nos enfants toute émotion difficile à vivre (mission impossible, et pourtant, on se retrouve bien souvent en plein dedans !), il s'agit de leur permettre de l'exprimer, de la sortir, en l'accueillant. Un aspect qu'on retrouve aussi bien chez Faber et Mazlish, que chez Aletha Solter dont je vous parlais l'an dernier dans mon billet sur le sommeil des bébés.
Et accueillir les émotions difficiles, ça peut même être revenir intentionnellement dessus, comme le souligne ce passage, et c'est à l'œuvre en ce moment avec ledit petit H.
Regardons donc cet extrait en action
- Pour une raison qui nous échappe, H. semble avoir une sacrée peur des araignées. (J'avoue que ça m'étonne chez un enfant aussi jeune. Un avis docte sur la question ??).
- Nous avons récemment eu droit à une impressionnante crise de panique lorsque qu'une grande araignée maigrichonne s'est cassé la margoulette et a atterri sur le rebord de la baignoire au moment de la douche. Notre Boubinours a été terrifié et les efforts maladroits de l'araignée pour regrimper le long d'un carrelage mural trop glissant, salués de hurlements d'angoisse.
- Après avoir attrapé l'araignée et l'avoir fichue dehors, j'ai reraconté tout l'épisode à un H. blotti dans mes bras (description chronologique des faits et des émotions associées) : du style "l'araignée était là, et elle est tombée, et toi tu avais peur, tu n'aimais pas ça du tout, tu as pleuré, elle a essayé de regrimper, ça te faisait peur, et ensuite j'ai attrapé l'araignée, j'ai ouvert la fenêtre pour la mettre dehors, et la peur était encore là alors nous avons fait un gros câlin, et tu t'es senti rassuré"
Et les jours qui ont suivi, à chaque douche, H. a pointé le coin de la baignoire concerné. Et à chaque fois, j'ai pris le temps de reraconter ce qui s'est passé, dans les détails. Il m'écoute attentivement, souligne certains passages de ses mots de gros bébé, et je remarque que l'intensité de l'émotion de départ semble décroître à chaque fois, de la même manière que la fréquence à laquelle il exprime le besoin de revenir dessus.
Un processus qui n'est pas sans me rappeler ma propre expérience en thérapie EMDR : revenir sur le souvenir douloureux dans un cadre rassurant désensibilise ce souvenir, c'est-à-dire le rend littéralement moins sensible, et permet son intégration.
Revenir exprès, avec empathie et douceur, sur le vécu douloureux, ce n'est pas verser de l'huile sur le feu, c'est venir nettoyer et apaiser une plaie à vif, pour lui permettre de cicatriser sainement.
Précision : la notion d'une séparation stricte entre cerveau droit et cerveau gauche telle qu'elle est évoquée dans ce passage est à présent remise en question / serait un neuromythe. Ce qui demeure et qu'il est important de retenir, c'est que pour toute activité, et notamment la gestion des émotions, différentes zones du cerveau sont à mobiliser, et que tout ce qui aide le cerveau à mobiliser plusieurs aires simultanément va dans le bon sens.